LES PAYS DE COCAGNE
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 Cahiers spartacus

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kamchatka
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kamchatka


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Date d'inscription : 17/12/2006

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MessageSujet: Cahiers spartacus   Cahiers spartacus EmptySam 30 Déc - 11:11

Les Cahiers Spartacus ne peuvent pas être séparés de l’engagement, de
la vie de
leur fondateur, René Lefeuvre.

Né en Bretagne, il commence à travailler à 16 ans. Son père, artisan
maçon, lui
apprendle métier, ce qui lui servira quand, prenant sa retraite, il
voudra se
construire une maison.

Il arrive à Paris au début des années 1920. Attiré par les réalisations
de la
révolutionrusse, il lit le Bulletin communiste de Boris Souvarine, et
participe aux
groupes de discussion qui se forment après l’exclusion de celui-ci du
Parti
communiste. Largement autodidacte, ils’intéresse non seulement à la
politique
révolutionnaire, mais aussi aux différents domaines de la création
artistique.
C’est ce qui l’amène à adhérer aux Amis de Monde, dont le rôleprincipal
est de
promouvoir cet hebdomadaire littéraire et artistique créé par Henri
Barbusseavec le
soutien de l’Union soviétique.

Devenu secrétaire de l’association, il en développe l’action
d’éducation populaire
– une action qu’il poursuivra toute sa vie – par la création de groupes
d’études.
Ceux-ci souhaitant «publier quelque chose», selon ses termes, il crée
Masses, un
mensuel dont le premier numéro paraît en janvier 1933, et qui durera un
an et demi,
jusqu’à ce qu’ayant perdu l’emploi qui lui permettait à la fois de
vivre et de le
faire paraître, il soit contraint de l’arrêter. C’est en publiant
Masses, avec les
conseils des ouvriers et des correcteurs de Monde, qu’il apprend les
métiers de
l’édition. Adhérant au Syndicat, il deviendra correcteur, son principal
métier
jusqu’à sa retraite.

Masses et les groupes d’éducation populaire dont elle est l’émanation
se réclament
de Marx ; mais s’ils défendent la révolution russe, ils ne manifestent
aucun
soutien au régime soviétique ni au parti communiste, et Masses prend
des positions
plus nettement anti-staliniennes que ne peut le faire Monde, qui publie
cependant
des articles de Lucien Lauratou de Amilcare Rossi. (1)

Dès décembre 1934, René reprend la publication d’un périodique, pour
lequel il
adopte le titre de Spartacus. Comme le mensuel éphémère du même nom
publié par
André Prudhommeaux en 1931, il fait référence non
pas tant à la révolte des esclaves romains qu’aux révolutionnaires
allemands de
1918 dont Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht ont été les porte-parole.
Cette
nouvelle publication, qui se veut hebdomadaire, porte en bandeau «Pour
la culture
révolutionnaire et l’action de masse», et le titre de l’éditorial du
premier numéro
est sans équivoque : «Pour la révolution socialiste».

Pour René Lefeuvre, déjà engagé dans l’action syndicale et culturelle,
le temps est
en effet venu d’un militantisme plus directement politique. Choqué par
les
manifestations d’extrême-droite du 6 février 1934 et par la prise de
position
initiale du Parti communiste à cetteoccasion, il adhère à la S.F.I.O
comme d’autres
contributeurs de Masses et se retrouve dans le courant de la Bataille
socialiste,
animé à l’époque par Jean Zyromski et Marceau Pivert.

En octobre 1935, Marceau Pivert et nombre de militants socialistes
révolutionnaires
seséparent de la Bataille socialiste pour créer leur propre courant à
l’intérieur
de la S.F.I.O., la Gauche révolutionnaire. René Lefeuvre va prendre en
charge la
publication du bulletin dumême nom, interne au parti. Dans l’été de
1936,
brièvement, de nouveau sous le titre de Masses, il en publiera une
version
destinée au public.

Depuis plusieurs années, René ressent la nécessité de faire connaître
certains
textes, detraiter de certains sujets, dans un format plus approprié que
celui d’une
revue, surtout d’une revue de combat et d’actualité. C’est ainsi qu’il
publie en
octobre 1936 le premier des Cahiers Spartacus, qu’il souhaite mensuels
: 16
fusillés à Moscou, de Victor Serge, qui relate le premier grand
procès-spectacle de
Staline, celui qui aboutit à la liquidation de figures historiques du
bolchevisme
comme Zinoviev, Kamenev et Smirnov. Victor Serge, emprisonné et déporté
en Sibérie,
vient à peine d’être libéré par l’Union soviétique, après une campagne
internationale de plusieurs années.

Ces premiers Cahiers Spartacus sont des brochures d’une soixantaine de
pages,
vendues 2 francs, soit à peu près le prix d’un kilo de pain à Paris en
1937. Si le
numéro 2, paru en novembre 1936, rassemble, comme une revue, des
articles sur
différents sujets, liés à l’actualité (l’union sacrée, la révolution
espagnole, la
nature du régime soviétique), les suivants seront consacrés à un sujet
unique,
parfois brûlant : intervention ou non-interventionen Espagne, dans le
n3 ; dans le
n4, les interventions des dirigeants de la Gauche révolutionnaire au
sujet des
sanctions que réclame contre elle la direction de la S.F.I.O. qui la
fera dissoudre
: en mars 1937, la fédération et les Jeunesse socialistes de la Seine,
dirigées par
ses militants, avaient protesté publiquement après qu’à Clichy cinq
manifestants
ont été tués par la police qui protégeait un meeting de
l’extrême-droite.

La Gauche révolutionnaire ne pouvant plus paraître sous ce titre, René
Lefeuvre
prendra alors en charge la publication des Cahiers rouges, nouveau
périodique du
courant.

Les Cahiers 6 et 7 seront consacrés à l’Espagne révolutionnaire : dans
le premier,
deux articles repris de Terre libre, la revue libertaire d’André et
Dori
Prudhommeaux, expliquent comment le peuple s’est armé contre
l’insurrection
franquiste, et ce que sont la C.N.T. et la F.A.I. Dans le second,
Marcel Ollivier
rend compte des journées de mai 1937 à Barcelone, au cours desquelles
la police
politique stalinienne s’emparera de militants libertaires et du
P.O.U.M et fera
disparaître nombre d’entre eux. (2)

Il paraîtra ainsi en deux ans une quinzaine de ces Cahiers «mensuels» ;
mais en
juin 1938,le Congrès de Royan de la S.F.I.O. ayant confirmé les
sanctions prises
contre la Gauche révolutionnaire, Marceau Pivert et ses camarades
créent le Parti
socialiste ouvrier et paysan (P.S.O.P.), et René prend en charge le
secrétariat de
rédaction de Juin 1936, l’organe du nouveau parti. Indépendamment, il
fera renaître
Masses en janvier 1939, pour trois numéros seulement.

Comme beaucoup de membres du P.S.O.P., René Lefeuvre est condamné à
une peine de
prison dès juillet 1939 pour l’appel du parti à la résistance contre la
guerre. Il
n’en sera pas moins mobilisé et sera
détenu en Allemagne pendant toute la guerre.

À la Libération, il retrouve certains de ses camarades à la S.F I.O. et
travaillera
pendant un temps au secrétariat de rédaction du Populaire, ainsi qu’aux
Éditions de
la Liberté. Ceci lui permet dès janvier 1946 de relancer Masses, pour
la quatrième
fois, avec pour sous-titre «Socialisme et liberté» : car l’un des
grands enjeux de
la période, c’est de résister à l’emprise du stalinisme sur le
mouvement ouvrier et
sa vie intellectuelle. Parallèlement, il reprend la publication des
Cahiers
Spartacus, dont le catalogue va s’accroître
sensiblement dans les deux années suivantes. Aux brochures, dont les
textes peuvent
être repris de celles d’avant-guerre, des classiques du socialisme ou
traiter de
questions d’actualité, s’ajoutent de véritables petits livres au format
un peu plus
important, au premier rang desquels Réforme ou révolution ? et Grève
générale,
parti et syndicats de Rosa Luxemburg. Complétant la publication en
brochures de La
révolution russe (en janvier 1937) et, (sous le titre Marxisme contre
dictature),
de ses Questions d’organisation de la social-
démocratie russe, ces textes de Rosa Luxemburg, devenus introuvables,
rappelaient
que le socialisme avait dû faire face depuis bien longtemps à son
usurpation par
ceux qui prétendaient en être l’expression, à la place et au dessus de
la masse de
ses partisans : par les réformistes qui les avaient conduits au
désastre en 1914 et
de nouveau dans les années 1930 ; et par les léninistes qui, refusant
la démocratie
ouvrière, avaient eux aussi ouvert la voie à la contre-révolution.
Autre exemple :
en juillet 1949, quelques mois avant que David Rousset ne reprenne ce
sujet dans Le
Figaro, les Cahiers Spartacus publient sous le titre L’U.R.S.S.
concentrationnaire
un (3) ensemble de documents rassemblés par Guy Vinatrel sur la
déportation de
masse et le travail forcé en Union soviétique.
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kamchatka
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MessageSujet: ...   Cahiers spartacus EmptySam 30 Déc - 11:12

Des livres, les Cahiers Spartacus en publieront d’autres en coédition,
au début des
années 1950, comme par exemple une biographie de Francisco Ferrer par
sa fille Sol
ou le Blanqui calomnié de Maurice Dommanget. C’est un autre livre de
Maurice
Dommanget, sur la vie et l’œuvre de Sylvain Maréchal, paru en 1950, qui
reste, avec
ses cinq cents pages, l’ouvrage le plus volumineux jamais publié par
les Cahiers
Spartacus. Malgré une subvention du C.N.R.S., la ponction sur les
ressources de
René fut considérable ! Car, comme c’était le cas
depuis le premier Masses, et comme cela le restera, René ne vivait pas
de ses
éditions : c’était elles qui vivaient de lui.

Dans un climat de stalinisme dominant, et avec l’évanouissement de
l’espoir
éphémère derénovation de la S.F.I.O. né avec l’arrivée de Guy Mollet au
secrétariat
général du parti, les lecteurs des Cahiers se font plus rares. Pendant
deux ans,
René Lefeuvre dirige encore Informations et ripostes, un bimensuel
fournissant les
militants socialistes en arguments anti-staliniens. Et puis la
politique algérienne
de la S.F.I.O. le décide, comme bien d’autres socialistes, à quitter
définitivement
ce parti.

Les Cahiers Spartacus ne paraîtront donc plus jusqu’en 1969. René en a
conservé les
stocks, mais il n’a plus de canal de diffusion. Dans les années qui
précèdent Mai
1968, un groupe de jeunes militants, soucieux de revivifier l’héritage
du marxisme
révolutionnaire étouffé par le réformisme et le marxisme-léninisme,
prend contact
avec lui et l’aide à remettre les Cahiers en circulation. Après Mai,
l’intérêt pour
les révolutions passées, pour la pensée socialiste, l’enthousiasme qui
renaît
autant chez de vieux compagnons que chez de
jeunes sympathisants amènent René à reprendre l’édition des Cahiers
Spartacus, dont
le catalogue va s’accroître de façon considérable dans les dix années
suivantes. Si
c’est sa vieille amie Ida Mett, dont il avait publié La commune de
Cronstadt en
1949, qui lui fournit le texte du premier Cahier de 1969 (4), des
individualités
nouvelles et de petits groupes vont venir entourer René et garnir avec
lui la
panoplie proposée aux lecteurs, dans un même esprit de critique de
l’ordre établi
et de l’orthodoxie marxiste-léniniste.

De nouveau, les Cahiers offriront des commentaires critiques sur
l’actualité, celle
de la révolution culturelle en Chine, des révoltes ouvrières en Pologne
ou du
changement de régime au Portugal. Des textes d’auteurs libertaires ou
des
communistes dits «de conseil» viendront enrichir le catalogue. En tout,
les Cahiers
Spartacus
publieront soixante titres nouveaux dans les années 1970.

En outre, René reprendra à des éditeurs amis des titres en fin de
carrière, pour en
faire bénéficier les abonnés. Car René a conservé les modes de
diffusion de la
presse, par les messageries et l’abonnement, ce qui l’oblige à
conserver un rythme
élevé de parution pour justifier du statut de périodique des Cahiers.
Le réseau des
messageries est beaucoup plus étoffé que celui des libraires qui
accueilleraient
les Cahiers, et il assure donc une diffusion plus large. Revers de la
médaille :
pour alimenter un grand nombre de kiosques, les tirages doivent être
plus
importants, et les retours, nécessairement nombreux, sont traités sans
ménagement
puisque le sort commun de la presse invendue est d’aller au pilon.

L’afflux des collaborations, le rythme des parutions, conduisent René à
renouer
avec son mode premier d’expression, la revue. Ainsi renaît Spartacus,
sous-titrée
de nouveau «Socialisme et liberté», dont 15 numéros paraîtront entre
1974 et 1979.
La faiblesse de sa diffusion, combinée au coût des tirages excessifs
des Cahiers,
viendront cette fois encore à bout des ressources de René, qui devra
donc
l’arrêter. C’est à cette époque, préoccupé de l’avenir de ses éditions,
qu’il crée
une association, les Amis de Spartacus, qui prendront officiellement la
responsabilité des Cahiers, qu’il continuera à animer jusqu’à sa mort à
86 ans, en
1988.

On conçoit bien que ce travail d’édition bénévole, dont René Lefeuvre a
assuré la
continuité pendant cinquante ans, n’aurait pas été possible sans sa
formidable
capacité à attirer les collaborations,
que ce soit pour un travail ponctuel ou pour des années.

Après sa disparition, il était naturel que des voix inquiètes expriment
des doutes
sur la capacité des membres de l’association, ses héritiers, à
poursuivre son
travail dans le même esprit. Mais ce qui les avait rassemblés
durablement autour de
lui, ce n’avait pas été la volonté de mettre en avant telle ou telle
thèse, tel ou
tel
point de vue. Ils partageaient avec lui cette double approche des
luttes pour la
transformation de la société : de les analyser, ainsi que leur
contexte, de la
façon la plus lucide possible, en faisant usage de façon appropriée de
la méthode
de Marx ; de rechercher les tendances et les facteurs qui favorisent la
réalisation
de ce but éminemment libertaire qui nous réunit tous : que
l’émancipation des
travailleurs soit l’oeuvre des travailleurs eux-mêmes.

Depuis, les Amis de Spartacus continuent à enrichir le catalogue des
Cahiers, y
faisant entrer des titres entièrement nouveaux ou des textes oubliés ou
épuisés
depuis longtemps. Heureusement, d’autres
éditeurs contribuent aussi à la réflexion de ceux qui cherchent dansles
luttes
passées des outils pour les combats présents et futurs. La course
aveugle et
chaotique du capitalisme bouleverse sans cesse les conditions de ces
combats, et
tant qu’il en sera ainsi, nous saurons comment accroître notre
catalogue.

On a reproché aux Cahiers Spartacus leur éclectisme. Pour le myope,
celui qui juge
le catalogue du point de vue de telle ou telle obédience doctrinale, il
peut en
être ainsi. Mais celui qui le regarde dans son ensemble, qui se place
du point de
vue de «ceux d’en face», comprend bien que le combat pour
l’émancipation humaine ne
peut se priver des leçons d’aucune expérience, d’aucun apport critique.
La liste
des auteurs figurant au catalogue est parlante : beaucoup d’entre eux
ont connu
l’exil, la prison ou la mort pour leur engagement dans ce combat. Ceux
qui, à un
moment ou à un autre, ont contribué à enrichir ce catalogue, à le
diffuser, ont
tous fait leur cette maxime de Condorcet : «La vérité appartient à ceux
qui
lacherchent et non à ceux qui prétendent la détenir». Tant que des
lecteurs en
seront persuadés, les Cahiers Spartacus pourront continuer.

Les Amis de Spartacus, avril 2006.


Notes
(1) Angelo Tasca, l’un des fondateurs du Parti communiste italien,
membre du
secrétariat de l’Internationale communiste, exclu en 1929.

(2) Parti Ouvrier d’Unification Marxiste, né en septembre 1935 de
l’union de la
Gauche communiste d’Andrès Nin et du Bloc ouvrier et paysan, dont le
secrétaire
général était Joaquin Maurin. Aux côtés de la C.N.T. et dela F.A.I., le
P.O.U.M.
avait joué un rôle essentiel à Barcelone dans le soulèvement contre le
coup d’État
franquiste. La Gauche révolutionnaire se reconnaissait dans le P.O.U.M.
et chercha
à lui apporter un soutien concret.

(3) Répondant à cet article dans les Lettres françaises, Pierre Daix
avait traité
David Rousset de faussaire et affirmé que les témoignages sur les camps
soviétiques
qu’il apportait n’étaient que des transpositions grossières de récits
sur les camps
nazis. Ceci donna l’occasion à David Rousset d’un procès en diffamation
dont le
compter endu, édité chez Dominique Wapler, fut également diffusé par
les Cahiers
Spartacus.

(4) Ida Mett, Le paysan russe dans la révolution et la post-révolution,
Cahier
Spartacus B24.


[ texte à paraître dans Divergences # 5 - janvier 2007 et repris du
site
http://divergences.be ]
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