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 Les nouvelles humiliations

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kamchatka
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kamchatka


Nombre de messages : 530
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MessageSujet: Les nouvelles humiliations   Les nouvelles humiliations EmptyDim 18 Fév - 16:53

voilà un article du monde... ...

Les nouvelles humiliations, par Jean-Michel Dumay
LE MONDE | 17.02.07 | 13h22 • Mis à jour le 17.02.07 | 13h28


(..) un jeune chômeur de 22 ans, habitant Laon, dans
l'Aisne, s'est
> vu contraint, la semaine dernière, de creuser lui-même la tombe de
son père. Un
> arrangement avec le marbrier pour réduire la facture. "C'est
honteux", a dit un
> ami qui a creusé avec le démuni. "Ce n'est pas un esclave !", s'est
indigné un
> proche de la famille. L'entrepreneur, un homme de métier au bord de
la
> retraite, a expliqué que "ce n'(était) pas un cas isolé". Et
d'ajouter : "Voir
> des gens qui se retrouvent dans la difficulté au moment de payer les
obsèques,
> cela arrive une fois tous les quinze jours en ce moment. Alors
qu'autrefois
> c'était trois ou quatre fois par an."
>
>
> La précarité mine et ronge : la société qui la déplore comme
l'individu qui en
> souffre. Le jeune homme sans ressources, qui n'a pu avancer que 80
des 1012
> euros requis, a choisi de porter son cas devant quelques médias :
"J'ai été
> choqué, mais je voulais le faire, pour que cela n'arrive pas à
d'autres." Un
> appel public, comme pour gagner en dignité. Un besoin d'expression,
comme pour
> effacer la marque de l'humiliation.
>
> On les voit beaucoup sur des pancartes, ces temps-ci, les mots
dérivés des
> formes modernes du sentiment d'humiliation. "On nous méprise",
ressent un
> salarié menacé d'une perte d'emploi. "Je ne suis pas une marionnette
sans fil",
> se convainc un SDF des berges du canal Saint-Martin. Et résonnent
encore ces
> slogans anti-CPE, d'une génération qui exprima hier le refus de se
sentir
> "jetable".
>
> D'où vient ce sentiment furieusement contemporain, qui touche au plus
profond
> de l'être, à son identité ? Il y a plus de deux siècles, la
Révolution avait
> coupé court avec ce ressenti violent en abolissant les privilèges. Or
voici que
> l'homme moderne, démocrate et citoyen, se sent à nouveau humilié.
>
> Par qui ? Par quoi ? Les temps ont changé. Hier, dans les sociétés de
> production, ils étaient ceux de la domination classique d'un homme
par un autre
> ou d'un groupe par un autre. Aujourd'hui, ils sont ceux de
l'exclusion dans la
> société de marché et de consommation. Dans cette société "fluide",
mondialisée,
> virtualisée, les repères éclatent, les frontières s'effacent, les
liens se
> distendent et se "superficialisent". On s'éloigne d'autrui, on
s'inscrit moins
> dans la durée. Et si l'on n'y prend garde, la pente est celle de
l'indifférence
> et du désengagement.
>
> L'individu apparaît de plus en plus isolé, fragilisé, pour ainsi dire
> "excluable". Et il en a durablement conscience. Dans le même temps,
l'étau des
> normes et des contraintes collectives (la religion, la famille,
l'école) se
> desserrant, la responsabilité individuelle est magnifiée. Dans chaque
secteur
> de la vie, l'individu se voit confier la responsabilité de son
destin. Chacun
> est sommé de faire son chemin. Or "confronté à l'incertain, aux
décisions
> personnelles, aux choix de vie et engagements, l'individu est
déstabilisé,
> dérouté. Il souffre", notait Alain Erhenberg (La Fatigue d'être soi,
Odile
> Jacob, 1998).
>
> Cela laisse des traces : une société fondée sur la sollicitation
permanente de
> soi provoque facilement des dépressions, un affaiblissement de
l'estime de soi,
> une fragilité, qui ouvre la porte au sentiment d'humiliation. Un
geste, un
> regard, une parole... Le sentiment est à son comble quand survient la
chute, ou
> quand naît seulement sa peur. Quand vient aussi le temps de ne plus
pouvoir
> consommer dans une société qui invite perpétuellement à le faire.
>
> "Que possède-t-on lorsqu'on n'a rien que soi-même ?", questionnait
Hannah
> Arendt. "(Voici) un problème majeur pour comprendre les formes
d'humiliation
> dans les sociétés individualistes centrées sur le soi", estime la
sociologue
> Claudine Haroche, dans un ouvrage codirigé avec Yves Déloye,
professeur de
> science politique (Le Sentiment d'humiliation, Editions In Press,
2006).
> "L'être et l'avoir tendant à être indistincts, écrit-elle, "montrer
ce que l'on
> a", c'est donc montrer "ce que l'on est"." Alors, évidemment, si l'on
n'a plus
> rien...
>
> Jean-Michel Dumay
> Article paru dans l'édition du 18.02.07.
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