LES PAYS DE COCAGNE
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 pourquoi anarchistes..?

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buenaventura
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buenaventura


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MessageSujet: pourquoi anarchistes..?   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:26

Pourquoi sommes-nous anarchistes ?
Elisée Reclus.


Les quelques lignes qui suivent ne constituent pas un programme. Elles n'ont d'autre but que de justifier l'utilité qu'il y aurait d'élaborer un projet de programme qui serait soumis à l'étude, aux observations, aux critiques de tous les révolutionnaires communistes.

Peut-être cependant renferment-elles une ou deux considérations qui pourraient trouver leur place dans le projet que je demande.

Nous sommes révolutionnaires parce que nous voulons la justice et que partout nous voyons l'injustice régner autour de nous. C'est en sens inverse du travail que sont distribués les produits du travail. L'oisif a tous les droits, même celui d'affamer son semblable, tandis que le travailleur n'a pas toujours le droit de mourir de faim en silence : on l'emprisonne quand il est coupable de grève. Des gens qui s'appellent prêtres essaient de faire croire au miracle pour que les intelligences leur soient asservies ; des gens appelés rois se disent issus d'un maître universel pour être maître à leur tour; des gens armés par eux taillent, sabrent et fusillent à leur aise; des personnes en robe noire qui se disent la justice par excellence condamnent le pauvre, absolvent le riche, vendent souvent les condamnations et les acquittements; des marchands distribuent du poison au lieu de nourriture, ils tuent en détail au lieu de tuer en gros et deviennent ainsi des capitalistes honorés. Le sac d'écus, voilà le maître, et celui qui le possède tient en son pouvoir la destinée des autres hommes. Tout cela nous paraît infâme et nous voulons le changer. Contre l'injustice nous faisons appel à la révolution.

Mais " la justice n'est qu'un mot, une convention pure ", nous dit-on.
" Ce qui existe, c'est le droit de la force ! " Eh bien, S'il en est ainsi, nous n'en sommes pas moins révolutionnaires. De deux choses furie: ou bien la justice est l'idéal humain et, dans ce cas, nous la revendiquons pour tous ; ou bien la force seule gouverne les sociétés et, dans ce cas, nous userons de la force contre nos ennemis. Ou la liberté des égaux ou la loi du talion.

Mais pourquoi se presser, nous disent tous ceux qui, pour se dispenser d'agir eux-mêmes, attendent tout du temps. La lente évolution des choses leur suffit, la révolution leur fait peur. Entre eux et nous l'histoire a prononcé. Jamais aucun progrès soit partiel, soit général ne s'est accompli par simple évolution pacifique, il s'est toujours fait par la révolution soudaine. Si le travail de préparation s'opère avec lenteur dans les esprits, la réalisation des idées a lieu brusquement: l'évolution se fait dans le cerveau, et ce sont les bras qui font la révolution.

Et comment procéder à cette révolution que nous voyons se préparer lentement dans la société et dont nous aidons l'avènement par tous nos efforts ?
Est-ce en nous groupant par corps subordonnés les uns aux autres ? Est-ce en nous constituant comme le monde bourgeois que nous combattons en un ensemble hiérarchique, ayant ses maîtres responsables et ses inférieurs irresponsables, tenus comme des instruments dans la main d'un chef ?
Commencerons-nous par abdiquer pour devenir libres ? Non, car nous sommes des anarchistes, c'est-à-dire des hommes qui veulent garder la pleine responsabilité de leurs actes, qui agissent en vertu de leurs droits et de leurs devoirs personnels, qui donnent à un être son développement naturel, qui n'ont personne pour maître et ne sont les maîtres de personne.

Nous voulons nous dégager de l'étreinte de l'Etat, n'avoir plus au-dessus de nous de supérieurs qui puissent nous commander, mettre leur volonté à la place de la nôtre.

Nous voulons déchirer toute loi extérieure, en nous tenant au développement conscient des lois intérieures de toute notre nature. En supprimant l'Etat, nous supprimons aussi toute morale officielle, sachant d'avance qu'il ne peut y avoir de la moralité dans l'obéissance à des lois incomprises, dans l'obéissance de pratique dont on ne cherche pas même à se rendre compte. Il n'y a de morale que dans la liberté. C'est aussi par la liberté seule que le renouvellement reste possible.Nous voulons garder notre esprit ouvert, se prêtant d'avance à tout progrès, à toute idée nouvelle, à toute généreuse initiative.

Mais, si nous sommes anarchistes, les ennemis de tout maître, nous sommes aussi communistes internationaux, car nous comprenons que la vie est impossible sans groupement social.
Isolés, nous ne pouvons rien, tandis que par l'union intime nous pouvons transformer le monde.
Nous nous associons les uns aux autres en hommes libres et égaux, travaillant à une oeuvre commune et réglant nos rapports mutuels par la justice et la bienveillance réciproque. Les haines religieuses et nationales ne peuvent nous séparer, puisque l'étude de la nature est notre seule religion et que nous avons le monde pour

patrie. Quant à la grande cause des férocités et des bassesses, elle cessera d'exister entre nous.
La terre deviendra propriété collective, les barrières seront enlevées et désormais le sol appartenant à tous pourra être aménagé pour l'agrément et le bien-être de tous. Les produits demandés seront précisément ceux que la terre peut le mieux fournir, et la production répondra exactement aux besoins, sans que jamais rien ne se perde comme dans le travail désordonné qui se fait aujourd'hui. De même la distribution de toutes ces richesses entre les hommes sera enlevée à l'exploiteur privé et se fera par le fonctionnement normal de la société tout entière.

Nous n'avons point à tracer d'avance le tableau de la société future : c'est à l'action spontanée de tous les hommes libres qu'il appartient de la créer et de lui donner sa forme, d'ailleurs incessamment changeante comme tous les phénomènes de la vie.
Mais ce que nous savons, c'est que toute injustice, tout crime de lèse-majesté humaine, nous trouveront toujours debout pour les combattre.
Tant que l'iniquité durera, nous, anarchistes-communistes- internationaux, nous resterons en état de révolution permanente.

Elisée Reclus
Texte paru dans la Société nouvelle, le 31 août 1889, repris par la revue Itinéraire
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buenaventura
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buenaventura


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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:27

L'INTERNATIONALE ANARCHISTE ET LA GUERRE (1915)

L'Europe en feu, une dizaine de millions d'hommes aux prises, dans la plus effroyable boucherie qu'ai jamais enregistrée l'histoire, des millions de femmes et d'enfants en larmes, la vie économique, intellectuelle et morale de sept grands peuples, brutalement suspendue, la menace, chaque jour plus grave, de complications nouvelles, tel est, depuis sept mois, le pénible, angoissant et odieux spectacle que nous offre le monde civilisé.
Mais spectacle attendu, au moins par les anarchistes, car pour eux, il n'a jamais fait et il ne fait aucun doute -les terribles événements d'aujourd'hui fortifient cette assurance- que la guerre est en permanente gestation dans l'organisme social actuel et que le conflit armé restreint ou généralisé, colonial ou européen est la conséquence naturelle et l'aboutissement nécessaire et fatal d'un régime qui a pour base l'inégalité économique des citoyens, repose sur l'antagonisme sauvage des intérêts et place le monde du travail sous l'étroite et douloureuse dépendance d'une minorité de parasites, détenteurs à la fois du pouvoir politique et de la puissance économique.
La guerre était inévitable ; d'où qu'elle vint, elle devait éclater.
Ce n'est pas en vain que depuis un demi siècle, on prépare fiévreusement les plus formidables armements et que l'on accroît tous les jours davantage les budgets de la mort. A perfectionner constamment le matériel de guerre, à tendre continûment tous les esprits et toutes les volontés vers la meilleure organisation de la machine militaire, on ne travaille pas à la paix. Aussi est-il naïf et puéril, après avoir multiplié les causes et les occasions de conflits, de chercher à établir les responsabilités de tel ou tel gouvernement.
Il n'y a pas de distinction possible entre les guerres offensives et les guerres défensives.

Dans le conflit actuel, les gouvernements de Berlin et de Vienne se sont justifiés avec des documents non moins authentiques que les gouvernements de Paris, de Londres, et de Pétrograd ; c'est à qui de ceux-ci ou de ceux-là produira les documents les plus indiscutables et plus décisifs pour établir sa bonne foi, et se présenter comme l'immaculé défenseur du droit et de la liberté, le champion de la civilisation.
La civilisation ? Qui donc la représente, en ce moment ?
Est-ce l'état allemand, avec son militarisme formidable et si puissant, qu'il a étouffé toute velléité de révolte ?
Est-ce l'état russe, dont le knout, le gibet et la Sibérie sont les seuls moyens de persuasion ?
Est-ce l'état français, avec Biribi, les sanglantes conquêtes du Tonkin, de Madagascar, du Maroc, avec le recrutement forcé des troupes noires ?
La France qui retient dans ses prisons, depuis des années, des camarades coupables seulement d'avoir parlé et écrit contre la guerre ?
Est-ce l'Angleterre qui exploite, divise, affame et opprime les populations de son immense empire colonial ?
Non.
Aucun des belligérants n'a le droit de se réclamer de la civilisation, comme aucun n'a le droit de se déclarer en état de légitime défense. La vérité, c'est que la cause des guerres, de celle qui ensanglante actuellement les plaines de l'Europe, comme de toutes celles qui l'ont précédée, réside uniquement dans l'existence de l'état, qui est la forme politique du privilège.

L'état est né de la force militaire ; il s'est développé en se servant de la force militaire ; et c'est encore sur la force militaire qu'il doit logiquement s'appuyer pour maintenir sa toute-puissance. Quelle que soit la forme qu'il revête, l'état n'est que l'oppression organisée au profit d'une minorité de privilégiés. Le conflit actuel illustre cela de façon frappante : toutes les formes de l'état se trouvent engagées dans la guerre présente : l'absolutisme avec la Russie, l'absolutisme mitigé de parlementarisme avec l'Allemagne, l'état régnant sur des peuples de races bien différentes avec l'Autriche, le régime démocratique constitutionnel avec l'Angleterre, et le régime démocratique républicain avec la France.

Le malheur des peuples qui, pourtant étaient tous profondément attachés à la paix, est d'avoir eu confiance en l'état, avec ses diplomates intrigants, en la démocratie et les partis politiques (même d'opposition, comme le socialisme parlementaire) pour éviter la guerre. Cette confiance a été trompée à dessein, et elle continue à l'être, lorsque les gouvernements, avec l'aide de toute leur presse, persuadent leurs peuples respectifs que cette guerre est une guerre de libération.
Nous sommes résolument contre toute guerre entre peuples et dans les pays neutres, comme l'Italie, où les gouvernants prétendent jeter encore de nouveaux peuples dans la fournaise guerrière, nos camarades se sont opposés, s'opposent, et s'opposeront toujours à la guerre, avec la dernière énergie.

Le rôle des anarchistes, quels que soient l'endroit ou la situation dans lesquels ils se trouvent, dans la tragédie actuelle, est de continuer à proclamer qu'il n'y a qu'une seule guerre de libération : celle qui dans tous les pays, est menée par les opprimés contre les oppresseurs, par les exploités contre les exploiteurs. Notre rôle, c'est appeler les esclaves à la révolte, contre leurs maîtres.
La propagande et l'action anarchistes doivent s'appliquer avec persévérance à affaiblir et à désagréger les divers états, à cultiver l'esprit de révolte, et à faire naître le mécontentement dans les peuples et dans les armées.
A tous les soldats de tous les pays, qui ont la foi de combattre pour la justice et la liberté, nous devons expliquer que leur héroïsme et leur vaillance ne serviront qu'à perpétuer la haine, la tyrannie et la misère.
Aux ouvriers de l'usine, il faut rappeler que les fusils qu'ils ont maintenant entre les mains, ont été employés contre eux dans les jours de grève et de légitime révolte et qu'ensuite, ils serviront encore contre eux, pour les obliger à subir l'exploitation patronale.
Aux paysans, montrer qu'après la guerre, il faudra encore une fois se courber sous le joug, continuer à cultiver la terre de leurs seigneurs et nourrir les riches.
A tous les parias, qu'ils ne doivent pas lâcher leurs armes avant d'avoir réglé leurs comptes avec leurs oppresseurs, avant d'avoir pris la terre et l'usine pour eux.
Aux mères, compagnes et filles, victimes d'un surcroît de misère et de privations, montrons quels sont les vrais responsables de leurs douleurs et du massacre de leurs pères, fils et maris.

Nous devons profiter de tous les mouvements de révolte de tous les mécontentements, pour fomenter l'insurrection, pour organiser la révolution, de laquelle nous attendons la fin de toutes les iniquités sociales. Pas de découragement même devant une calamité comme la guerre actuelle.
C'est dans des périodes aussi troublées où des milliers d'hommes donnent héroïquement leur vie pour une idée, qu'il faut que nous montrions à ces hommes la générosité, la grandeur et la beauté de l'idéal anarchiste ; la justice sociale réalisée par l'organisation libre des producteurs ; la guerre et le militarisme à jamais supprimés ; la liberté entière conquise par la destruction totale de l'état et de ses organismes de coercition.

Vive l'anarchie !

Londres, 12 février 1915

Léonard d'Abbet, Alexandre Berckmann, L. Bertoni, L. Bersani, G. Bernard,
A. Bernado, G. Barett, E. Boudot, A. Gazitta, Joseph-J Cohen, Henri Combes, Nestor Ciek van Diepen, F.W. Dunn, Ch. Frigerio, Emma Goldman, V. Garcia, Hippolyte Havel, T.H. Keell, Harry Kelly, J. Lemarie, E. Malatesta, Noël Paravich,
E. Recchioni, G. Rijuders, J. Rochtenine, A. Savioli, A. Schapiro, William Shatoff, V.J.C. Schermerhorn, C. Trombetti, P. Vallina, G. Vignati, L.J. Wolf, S. Yanosky.


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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:28

les mutineries de la Mer Noire (avril 1919)
les prémisses par Albert Cané











Voterro,
marin sur le Condorcet

Dans son livre " Libertaires, mes compagnons de Brest et d'ailleurs " (1), René Lochu évoque les mutineries de la flotte française en 1919. Après avoir consacré, la semaine dernière, une note de lecture à ce livre, Le Monde libertaire présente dans le cadre de la page " Archives " un large aperçu de cette révolte en mer Noire. Si en 1917, l'armée française embourbée sur le front a connu des mutineries dues à la lassitude devant une guerre qui n'en finissait pas, aux attaques mal préparées qui se terminaient en véritables hécatombes et à la propagande pacifiste de l'arrière, c'est seulement un an après l'armistice que des troubles vont secouer la Royale.
En 1919, la guerre achevée, bon nombre de marins ne sont toujours pas démobilisés et se trouvent de fait entraînés dans une opération destinée à défendre les intérêts de la bourgeoisie internationale. Le " ras-le-bol " et le refus plus ou moins conscient de jouer aux contre-révolutionnaires, de se transformer en " marines " de la bourgeoisie vont aboutir à des mutineries : en mer Noire, en avril 1919, entre autres, celle du France et celle du Protêt, la plus connue en raison de la personnalité de l'officier mécanicien Marty, et aux larges des côtes grecques en Juin, celle du Guichen où s'illustra Tillon.
Marty et Tillon, en rejoignant le Parti communiste, furent l'objet d'une campagne publicitaire qui rejeta au néant de l'histoire les noms d'autres mutins tout aussi authentiques.
Espérons que le texte présenté ici, extrait d'un numéro de 1953 de Contre-courant les ressortiront de l'ombre.
Ces textes ont été écrit peu après l'éviction du P.C.F. de Marty, l'ancien des brigades internationales d'Espagne où les anarchistes le surnommèrent avec mépris le boucher d'Albacete, et l'ancien résistant. Epoque où le parti se débarrassait de ses fortes "têtes", et où Marchais commençait son ascension.

LES PRÉMISSES

L'affaire des marins de la mer Noire est plus ancienne que les événements d'avril 1919 qui ne sont que les conséquences de l'action révolutionnaire menée à bord du France dés 1914, au mois de juin, par les jeunes camarades des Jeunesses syndicalistes de Nantes, Saint-Nazaire, Brest et Paris, embarqués au titre des classes 1912 et 1913.
Poincarré et Viviani furent accueillis à bord, à Dunkerque, le 15 juillet 1914, au chant de l'Internationale.
Revenus de Suède après une visite au tsar de toutes les Russies, nous étions le seul bateau à Brest qui n'entonnait pas la Marseillaise à la déclaration de guerre.
En 1913, dans l'Adriatique, un groupe révolutionnaire est constitué à bord du France, qui comprend 50 abonnés à "Ce qu'il faut dire" (CQFD) et fonde une bibliothèque de plus de 300 volumes en 1916.
En 1917, la contradiction est portée sur le pont à l'aumônier en chef d'escadre. Rollin-Gosselin, coadjuteur du cardinal Àmette, puis un grand nombre de camarades, dont je faisais partie, refusent au commandant de cesser la correspondance que nous entretenions avec Sébastien Faure.
Toujours en 1917, en août, le barde breton Théodore Botrel vient donner à bord un concert, auquel assistent trente à quarante personnes.
Un vrai désastre !
Durant ce temps nous organisons sur la plage, en riposte, un concert qui groupe 800 matelots. Des incidents vont surgir. Se rendant compte du fiasco qu'il subit, le commandant nous fait évacuer.
Nous répondons par l'Internationale, la Jeune Garde, Révolution.
Bousculé par le capitaine d'arme, je le frappe, suis arrêté et mis en prévention de conseil de guerre. Démarche auprès de Clémenceau, président du Conseil, qui se souvient de mon refus d'aller présenter les armes à la messe, dans le passé.
Le vieux Tigre intervient en ma faveur ; j'ai eu un non-lieu, mais trente camarades sont débarqués. Par mesure disciplinaire, je vais sur un autre bateau en surveillance, d'autres aux sections spéciales à Calvi, mais nous laissons à bord du France trois ans de propagande révolutionnaire et anarchiste.

Albert Cané, animateur du "Comité des Marins"

(l) Edltion Digitale, en venté à la librairie du Monde libertaire.


Affiche éditée par la Fédération Anarchiste en soutien aux mutins de la Mer Noire.
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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:29

le congrès de Saint Imier (15-16 septembre 1872)
Commentaires et résolutions

Si les anarchistes n'écrivent pas leur histoire, ce seront les autres qui l'écriront à notre place, mais dénoncer les erreurs ou les interprétations abusives que des plumitifs peuvent porter sur notre mouvement est une tâche, certes, indispensable, mais ce n'est pas tout.
La confiance de notre histoire doit non pas de l'érudition en elle-même, mais une arme de plus dont nous nous dotons pour mettre à bas la société actuelle. Militants de la fédération anarchiste, nous nous inscrivons dans une tradition de luttes qui visent l'affranchissement de l'individu et de l'humanité entière pour la suppression de tout privilège économique et politique.
Tradition qui plonge ses racines dans le siècle des Lumières, qui prend son -or dans la deuxième moitié du XIX siècle et qui accompagne le mouvement ouvrier tout au long de son histoire.
Voilà notre héritage que nous devons sans cesse vivifier.
Mais enfermés dans notre action quotidienne, nous saisissons mal les mille liens qui nous rattachent au passé, la richesse même de notre mouvement. Le premier des objectifs utiles que devra se fixer l'histoire anarchiste sera de montrer la continuité, l'unité de notre démarche.
Le congrès de Saint-lmier, dont nous vous présentons cette semaine les résolutions, a fait état, jusqu'à ce jour, d'une abondante littérature à laquelle nous renvoyons le lecteur. Disons seulement que, décidé au lendemain du congrès de La Haye (2-7 septembre 1872, au cours duquel une majorité marxiste fictive de l'AIT avait expulsé Bakounine et Guillaume, le congrès de Saint-Imier (15-16 septembre 1872) regroupa les fédérations de l'Internationale qui refusaient de reconnaître la politique autoritaire menée par Marx et le Conseil général de Londres.
Ce congrès n'était pas spécifiquement anarchiste et visait surtout à maintenir l'unité du mouvement ouvrier et de l'Internationale, compromise par les agissements de Marx.
Les résolutions adoptées n'en résument pas moins les points essentiels des principe au nom desquels Bakounine et ses amis s'étaient réunis contre les "autoritaires".

Véritable charte de " l'anarchisme ouvrier ", ces considérants voient dans l'organisation et la résistance de la classe ouvrière, produit de l'antagonisme entre travail et capital, le terrain d'action privilégié pour préparer l'émancipation du prolétariat.


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Prémière résolution :

Attitude des Fédérations réunies en Congrès à Saint-lmier, en présence des résolutions du congrès de La Haye et du Conseil général :
Considérant que l'autonomie et l'indépendance des fédérations et sections ouvrières sont la première condition à l'émancipation des travailleurs ; que tout pouvoir législatif et réglementaire accordé aux Congrès serait une négation flagrante de cette autonomie et de cette liberté, le congrès dénie en principe le droit législatif à tous les congrès, mit généraux mit régionaux, ne leur reconnaissant d'autre mission que celle de mettre en présence les aspirations, besoins et idées du prolétariat des différentes localités ou pays, afin que leur harmonisation et leur unification s'y opèrent autant que possible.
Mais dans aucun cas la majorité d'un congrès quelquonque ne pourra imposer ses résolutions à la minorité.
Considérant d'autre part que l'institution du Conseil général dans l'Internationale est, par sa nature même et fatalement, poussée à devenir une violation permanente de cette liberté qui doit être la base fondamentale de notre grande Association ;
considérant que les actes du Conseil général de Londres qui vient d'être dissous, pendant. ces trois dernières années, sont la preuve vivante du vice inhérent à cette institution ; que pour augmenter sa puissance d'abord très minime, il a eu recours aux intrigues, aux mensonges, aux calomnies les plus infâmes pour tenter de salir tous ceux qui ont osé le combattre ; que pour arriver à l'accomplissement final de ses vues, il a préparé de longue main le congrès de La Haye, dont la majorité, artificiellement organisée, n'a évidemment eu d'autre but que de faire triompher dans l'Internationale la domination d'un parti autoritaire, et que, pour atteindre ce but, elle n'a pas craint de fouler aux pieds toute décence et toute justice ; qu'un tel congrès ne peut pas être l'expression du prolétariat des pays qui s'y sont fait représenter : le congrès des délégués des fédérations espagnole, italienne, jurassienne, américaine et française, réuni à Saint-Imier, déclare repousser absolument toutes les résolutions du congrès de La Haye, et pour sauver et fortifier davantage l'unité de l'Internationale, les délégués ont jeté les bases d'un projet de pacte de solidarité entre ces fédérations.

Deuxième résolution

Pacte d'amitié, de solidarité et de défense mutuelle entre les fédérations libres :
" Considérant que la grande unité de l'Internationale est fondée non sur l'organisation artificielle, mais sur l'identité réelle des intérêts et des aspirations du prolétariat de tous les pays, les délégués réunis à ce congrè sont conclu, au nom de ces fédérations et section, et sauf leur acceptation et confirmation définitives, un pacte d'amitié, de solidarité et de défense mutuelle.
Ils proclament hautement que la conclusion de ce pacte a pour but principal le salut de cette grande unité de l'Internationale, que l'ambition du parti autoritaire a mis en danger.

Troisième résolution

Nature de l'action politique du prolétariat :
Considérant que vouloir imposer au prolétariat une ligne de conduite ou un programme politique uniforme, comme la voie unique qui puisse le conduire à son émancipation sociale, est une prétention aussi absurde que réactionnaire ; que nul n'a le droit de priver les fédérations et sections autonomes du droit incontestable de déterminer elles-mêmes et suivre la ligne de conduite politique qu'elles croiront la meilleure, et que toute tentative semblable nous conduirait fatalement au plus révoltant dogmatisme ; que les aspirations du prolétariat ne peuvent avoir d'autre objet que l'établissement d'une organisation et d'une fédération économiques absolument libres, fondées sur le travail et l'égalité de tous et absolument indépendantes, de tout gouvernement politique, et que cette organisation et cette fédération ne peuvent être que le résultat de l'action spontanée du prolétariat lui-même, des corps de métier et des communes autonomes ;
considérant que toute organisation de la domination au profit d'une classe et au détriment des masses, et que le prolétariat, s'il voulait s'emparer du pouvoir, deviendrait lui-même une classe dominante et exploiteuse : le congrès réuni à Saint-lmier déclare :
- 1) que la destruction de tout pouvoir politique est le premier devoir du prolétariat ;
- 2) que toute organisation d'un pouvoir politique soi-disant provisoire et révolutionnaire pour amener cette destruction ne peut être qu'une tromperie de plus et serait aussi dangereuse pour le prolétariat que tous les gouvernements existant aujourd'hui ;
- 3) que, repoussant tout compromis pour arriver à l'accomplissement de la révolution sociale, les prolétaires de tous les pays doivent établir, en dehors de toute politique bourgeoise, la solidarité de l'action révolutionnaire.

Quatrième résolution

Organisation de la résistance du travail
- Statistiques : La liberté et le travail sont la base de la morale, de la force, de la vie et de la richesse de l'avenir. Mais le travail, s'il n'est pas librement organisé, devient oppressif et improductif pour le travailleur ; et c'est pour cela que l'organisation du travail est la condition indispensable de la véritable et complète émancipation de l'ouvrier. Cependant, le travail ne peut s'exercer librement sans la possession des matières premières et de tout le capital social, et ne peut s'organiser si l'ouvrier, s'émancipant de la tyrannie politique et économique, ne conquiert le droit de se développer complètement dans toutes ses facultés.
Tout Etat, c'est-à-dire tout gouvernement et toute administration des masses populaires, de haut en bas, étant nécessairement fondé sur la bureaucratie, sur les armées, sur l'espionnage, sur le clergé, ne pourra jamais établir la société organisée sur le travail et sur la justice, puisque par la nature même de son organisme, il est poussé fatalement à opprimer celui-là et à nier celle-ci. Suivant nous, l'ouvrier ne pourra jamais s'émanciper de l'oppression séculaire, si à ce corps absorbant et démoralisateur, il ne substitue la libre fédération de tous les groupes producteurs fondée sur la solidarité et sur l'égalité.
En effet, en plusieurs endroits déjà on a tenté d'organiser le travail pour améliorer la condition du prolétariat, mais la moindre amélioration a bientôt été absorbée par la classe privilégiée qui tente continuellement sans frein et sans limite, d'exploiter la classe ouvrière. Cependant, l'avantage de cette organisation est tel que, même dans l'état actuel des choses, on ne saurait y renoncer.
Elle fait fraterniser toujours davantage le prolétariat dans la communauté des intérêts, elle l'exerce à la vie collective, elle le prépare pour la lutte suprême.
Bien plus, l'organisation libre et spontanée du travail étant celle qui doit se substituer à l'organisme privilégié et autoritaire de l'Etat politique, sera, une fois établie, la garantie permanente du maintien de l'organisme économique contre l'organisme politique.
Par conséquent, laissant à la pratique de la révolution sociale les détails de l'organisation positive, nous entendons organiser et solidariser la résistance sur une large échelle. La grève est pour nous un moyen précieux de lutte, mais nous ne nous faisons aucune illusion sur ses résultats économiques. Nous l'acceptons comme un produit de l'antagonisme entre le travail et le capital, ayant nécessairement pour conséquence de rendre les ouvriers de plus en plus conscients de l'abîme qui existe entre la bourgeoisie et le prolétariat, de fortifier l'organisation des travailleurs, et de préparer, par le fait des simples lunes économiques, le prolétariat à la grande lutte révolutionnaire et définitive qui, détruisant tout privilège et toute distinction de classe, donnera à l'ouvrier le droit de jouir du produit intégral de son travail, et par là les moyens de développer dans la collectivité toute sa force intellectuelle, matérielle et morale.
La Commission propose au congrès de nommer une commission qui devra présenter au prochain congrès un projet d'organisation universelle de la résistance, et des tableaux complets de la -statistique du travail dans lequel cette lutte puisera de la lumière. Elle recommande l'organisation espagnole comme la meilleure jusqu'à ce jour.
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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:30

la véritable histoire du Drapeau Noir et du "A cerclé"



























C'est triste à dire,
je ne pense pas qu'on puisse
vaincre sans
les drapeaux
rouge et noir...
Mais il faut les détruire après !
Jean Genet.

Nos députés entreprennent de sauver les trois couleurs...
Mais d'où nous vient le drapeau noir ?


NOMBRE de nouveaux militants, sympathisants, ou tout simplement des personnes curieuses, nous demandent, lors des manifs ou pendant les ventes sur les marchés: mais d'où vient le drapeau noir des anarchistes ? Jusqu'à présent, je répondais par quelques… à peu près. Mais, j'ai décidé d'en savoir plus. Et je ne suis pas allé très loin… chercher
la réponse. En effet, Line Roca (de notre groupe) a bien voulu nous éclairer. Elle travaille
justement sur le sujet et accepte de nous en livrer la substantifique moelle :
" En 1872, à La Haye, la scission est officiellement consommée entre les socialistes autoritaires et les anarchistes.1 Au cours des années 1880 se manifeste cependant, chez les anarchistes, le besoin de se différencier des autres groupes révolutionnaires, et l'adoption du drapeau noir est, symboliquement, une étape importante, dans la naissance de l'anarchisme. En effet, le drapeau rouge était jusqu'alors le drapeau de l'Internationale, également choisi par la Commune, ainsi que par le reste du mouvement ouvrier.
" Or, dès 1882, les anarchistes se prononcent pour l'abandon de celui-ci, au profit du noir, celui de la révolte. Le numéro 1 du Drapeau noir du 12 août 1883 s'exprime, en effet, sur ce choix : "Les événements, les faits de tous les jours, nous ont montré clairement que le drapeau rouge, si glorieux vaincu, pourrait bien, vainqueur, couvrir de ses plis flamboyants, les rêves ambitieux de quelques intrigants de bas étages. Puisqu'il a déjà abrité un gouvernement et servi d'étendard à une autorité constituée. C'est alors que nous avons compris qu'il ne pouvait plus être pour nous, les indisciplinés de tous les jours et les révoltés de toutes les heures, qu'un embarras ou qu'un leurre."
" Le 18 mars, Louise Michel s'exclame salle Favié à Paris : "Plus de drapeau rouge, mouillé du sang de nos soldats. J'arborerai le drapeau noir, portant le deuil de nos morts et de nos illusions."(2) Louise Michel reprend le même discours à Lyon, devant une foule qui, lors de la révolte des Canuts ,avait vu, pour la première fois l'apparition du drapeau noir. Elle était encore dans les mémoires.
" Le drapeau noir fait ensuite une apparition "officielle" dans la manifestation des sans-travail aux Invalides à Paris, le 9 mars 1883, lors d'un meeting organisé par le syndicat des menuisiers.(3)
Louise Michel y arbore, pour la première fois, un drapeau improvisé, à partir d'un vieux jupon noir fixé sur un manche à balai. Plus tard, lors d'un de ses procès, elle affirme : "Le drapeau noir, drapeau de la misère, plutôt que celui de la Commune, doit être considéré comme le symbole des ouvriers sans travail."
" Quelques mois plus tard, pour la fête du 14 Juillet, les anarchistes invitent la population à manifester "un drapeau noir à la main". À cette époque, un article paru dans le Drapeau noir, rappelle que "seul celui-ci peut convenir pour représenter le combat anarchiste, la guerre de partisans et le combat des tirailleurs dispersés."
En effet, comme ne manque pas de le noter Gaetano Manfredonia, dans la Chanson anarchiste en France : Le drapeau noir signifie la distance vis-à-vis de l'héritage communard et des autres courants socialistes, à un moment où le mouvement anarchiste construit sa spécificité.
Tous nos remerciements à Line Roca.

Patrick Schindler
groupe-claaaaaash@federation-anarchiste.org

1. Le " communisme autoritaire " est défini comme étant celui de l'Internationale et plus particulièrement celui de Marx et d'Engels. Ce dernier, dans une lettre à Paul Lafargue, se plaint que les " bakouninistes " se servent abusivement du mot, pour dénoncer tout ce qui leur est hostile. Cf. Jean Dubois, le Vocabulaire politique et social en France.
2. Cité par Maurice Dommanget dans l'Histoire du drapeau rouge, des origines à la guerre de 1939. Ouvrage dans lequel l'auteur rappelle à quel point le drapeau noir, pour lequel Jules Vallès s'est prononcé, est lié à la personnalité de Louise Michel et au souvenir de la Commune.
3. Le syndicat des menuisiers avait convoqué les sans-travail à un meeting devant l'esplanade des Invalides. La police dispersa les manifestants qui organisèrent alors, une manifestation vers le boulevard Saint-Germain. Menée par Louise Michel, Émile Pouget et Mareuil, elle fut suivie par 500 ou 600 personnes. Des pillages eurent lieu aux cris de: " Du pain, du travail ou… du plomb. " Et Louise Michel et Émile Pouget y furent condamnés, respectivement, à six ans de réclusion.


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La véridique histoire du A cerclé

LE A DANS UN CERCLE est un sigle si répandu, si connu et reconnu qu'on a fini par le prendre pour un symbole traditionnel de l'anarchisme, comme s'il avait existé depuis toujours. La rumeur le fait parfois remonter à la Révolution espagnole: l'œil des jeunes anarchistes est plus habitué à voir un A cerclé qu'une cible peinte sur le casque d'un milicien. Certains croient qu'il ferait référence à Proudhon, résumant son idée de l'Anarchie dans l'Ordre. En réalité, il s'agit d'un phénomène récent dans l'iconographie libertaire :
le A cerclé a en effet été inventé à Paris en 1964 et réinventé à Milan en 1966.

Deux dates, deux lieux de naissance? Voyons-y de plus près.
C'est en avril 1964, sur la couverture du bulletin Jeunes Libertaires qu'apparaît le dessin d'un sigle que le groupe JL. de Paris propose "à l'ensemble du mouvement anarchiste" par delà les différents courants et les divers groupes ou organisations. Deux motivations principales nous ont guidés : d'abord faciliter et rendre plus efficace les activités pratiques d'inscriptions et affichages, ensuite assurer une présence plus large du mouvement anarchiste aux yeux des gens, par un caractère commun à toutes les expressions de l'anarchisme dans ses manifestations publiques. Plus précisément, il s'agissait pour nous d'une part de trouver un moyen pratique permettant de réduire au minimum le temps d'inscription en nous évitant d'apposer une signature trop longue sous nos slogans, d'autre part de choisir un sigle suffisamment général pour pouvoir être adopté, utilisé par tous les anarchistes. Le sigle adopté nous a paru répondre le mieux à ces critères. En l'associant constamment au mot anarchiste il finira, par un automatisme mental bien connu, par évoquer tout seul l'idée de l'anarchisme dans l'esprit des gens.
Le sigle proposé est un A majuscule inscrit dans un cercle ; Tomás Ibañez en est l'initiateur, René Darras le réalisateur. D'où vient l'idée, de la simplicité de réalisation (en particulier avec la méthode d'impression par stencils de l'époque !), du sigle antimilitariste déjà répandu du CND (Campaign for Nuclear Disarmament), d'autres inspirations ? L'Alliance ouvrière anarchiste affirme l'avoir utilisé dans sa correspondance dès la fin des années 1950 ; mais il ne figure dans son bulletin qu'à partir de juin 1968.
La proposition des Jeunes Libertaires de 1964 n'a eu aucun succès, hormis quelques graffitis dans les couloirs du métro parisien - n'oublions pas qu'alors on imprimait soit sur stencils, soit en typographie classique, et qu'il aurait donc fallu réaliser un cliché au plomb figurant un A inscrit dans un cercle. En décembre de la même année, le A cerclé apparaît en titre d'un article signé Tomás [Ibañez] dans le journal Action libertaire. Le réseau des Jeunes Libertaires, qui comptait au début des années 60 plusieurs groupes dans toute la France, s'est affaibli : les bulletins régionaux ne paraissent plus et le bulletin parisien sera en sommeil de 1965 à 1967 ; plusieurs " J. L. " seront par la suite aux premiers rangs du mouvement de Mai 68.
Fin du premier chapitre.

Il faut attendre 1966 pour que le symbole du A cerclé soit repris et utilisé, d'abord à titre expérimental puis régulièrement, par la Gioventù libertaria de Milan, qui avait des rapports fraternels avec les jeunes Parisiens. Ces deux groupes ont été à l'origine du Comité européen de liaison des jeunes anarchistes (CLJA). C'est alors que commence la vie publique du sigle.
Les premières fois qu'on le voit, c'est justement à Milan, où il sert de signature habituelle aux tracts et aux affiches des jeunes anarchistes, parfois associé au signe antinucléaire et à la pomme des provos hollandais. Puis il s'étend en Italie et dans le monde entier ; mais on n'a presque point vu de A cerclés pendant le mai parisien en 1968, les premières traces n'apparaissent guère qu'en 1972-73. C'est en effet au début des années 70 qu'explose la mode du A cerclé, que s'approprient et qu'imitent les jeunes anars dans le monde. Il connaît un tel succès que, selon un avis autorisé, si son inventeur l'avait breveté il serait milliardaire aujourd'hui. Pourquoi ce succès si rapide, si frappant ? Il est dû aux motifs mêmes qui avaient fait proposer le sigle par les J.L. : d'une part il est extrêmement facile à dessiner, aussi simple que la croix, plus simple que la croix gammée ou la faucille et le marteau ; d'autre part, un mouvement nouveau, jeune, en plein développement, avait appris à écrire sur les murs et se cherchait un signe de reconnaissance. C'est ainsi que le A cerclé s'est imposé de fait, sans qu'aucune organisation ni groupe n'ait jamais songé à en décréter l'utilisation, et en l'absence d'un autre symbole graphique international des anarchistes (qui utilisaient parfois une symbolique désuète, comme la torche en Italie).
Voilà donc la véridique histoire du A cerclé, faite de volonté consciente et de spontanéité : un cocktail typiquement libertaire. Toute autre histoire est légende.

Amédéo Bertolo, Marianne Enckell

Pour plus de précisions, nous vous renvoyons au bulletin n° 58 du CIRA
(Centre international de recherches sur l'anarchisme) mars-octobre 2002 d'où est extrait ce texte. CIRA, av. de Beaumont, 24, CH-1012 Lausanne, Suisse. http://www.anarcabolo.ch/cira/ ou cira@plusloin.org
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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:34

ACTION DIRECTE :
Action individuelle ou collective exercée sans intermédiaires, contre l'Etat et le patronat, au cours des conflits qui opposent Capital et Travail. L'action directe s'oppose au collaborationnisme et à l'action parlementaire. Elle peut être légale ou illégale, défensive ou préventive. Sans exclure la violence, elle n'y fait pas recours nécessairement. La grève, le boycottage, le sabotage font partie des formes qu'elle prend généralement.

ANARCHIE
(Du grec a, privatif, et arché, commandement, pouvoir, autorité.) Etat d'un peuple, d'un milieu social, émancipé de toute tutelle gouvernementale. Système social fondé sur la libre entente de toutes les composantes de la société.

ANARCHISME
Ensemble de principes généraux, de conceptions fondamentales et d'applications pratiques tendant à supprimer l'Etat, à éliminer de la société tout pouvoir politique, économique, intellectuel ou moral.

ANARCHO SYNDICALISME
L'anarcho-syndicalisme est un mouvement organique et organisé. Il est, sur le plan économique et social, ainsi que sur le terrain révolutionnaire, une des expressions de l'anarchisme. L'anarcho-syndicalisme s'oppose fondamentalement au syndicalisme politique et réformiste. Il défend les conditions de vie des travailleurs et les prépare à leur affranchissement économique et social.

ANTIMILITARISME
Fondamentalement lié à l'antiétatisme, l'antimilitarisrne anarchiste combat l'existence même de l'institution militaire, pilier séculaire de l'Etat. . L'objection de conscience, l'insoumission au service national, l'insubordination, la désertion et la résistance à l'emprise de l'armée sur la société sont autant d'exemples de luttes antimilitaristes. Celles-ci, pour être conséquentes, doivent s'inscrire dans le cadre d'un combat global contre l'Etat et le Capital.

ATHÉISME
Théorie de ceux qui ne reconnaissent pas l'existence d'un dieu quelconque, d'un être supérieur à la nature humaine, d'une intelligence réglant les mouvements de l'univers et intervenant dans les affaires des hommes. S'ils refusent l'idée de Dieu, les anarchistes combattent aussi les applications de cette idée, les religions et leurs institutions.

AUTONOMIE
(Du grec autonomes, qui se régit par ses propres lois. ) Possibilité des individus et des groupes de s'organiser et de s'administrer eux-mêmes. L'autonomie, que l'on ne doit pas confondre avec l'indépendance, implique l'existence de règles et de liens librement consentis.

CAPACITÉ (Capacité des classes ouvrières)
Pour les anarchistes, la classe ouvrière, du point de vue de ses rapports avec la société et avec l'Etat, a acquis conscience d'elle-même comme être collectif, moral et libre ; elle se distingue de la bourgeoisie, elle en sépare ses intérêts. Elle possède une idée, c'est- à-dire elle s'est créé une notion de sa propre constitution, elle connaît les lois, conditions et formules de son existence ; elle prévoit sa destinée, sa fin, elle se comprend elle-même dans ses rapports avec la société et l'Etat, mais d'une manière incomplète. Les classes ouvrières ne sont pas encore parvenues à déduire de ces principes une pratique générale conforme ; témoin : les préjugés politiques de toutes sortes auxquels elles obéissent. Pour les anarchistes, les classes ouvrières ont conscience d'elles-mêmes, mais doivent affirmer plus complètement l'idée qui en résulte et en poursuivre l'application.

CLASSES
Pendant longtemps, la lutte des classes a été considérée comme l'affrontement entre deux classes aux intérêts antagonistes : la bourgeoisie, propriétaire des moyens de production et de distribution, et le prolétariat, détenteur de sa seule force de travail. Mais la notion de propriété ne suffit plus en elle-même pour déterminer l'appartenance à une classe ou à une autre. Aussi déterminante est la position que l'on occupe dans la division hiérarchique du travail social, par rapport aux contenus de pouvoir de cette position ; c'est-à-dire selon que celle-ci comporte l'exercice du pouvoir ou la soumission à celui-ci.

COLLECTIVISME
Régime social et doctrine de la propriété des moyen de production et d'échange pour la collectivité. Système fondé sur la formule " A chacun selon son travail " en matière de distribution.

COMMUNISME
Doctrine politique d'origine autoritaire, le communisme est aussi une organisation économique et sociale ayant pour base la suppression de la propriété privée au profit de la propriété collective. Système fondé sur la formule "De chacun suivant sa capacité, à chacun suivant ses besoins." Comme n'est jamais défini qui fera l'évaluation de la capacité et qui sera juge des besoins, les formules collectivistes et communistes connaissent toujours des interprétations autoritaires et étatistes.

COMMUNISME ANARCHISTE
Système économique et social fondé sur l'abolition de la propriété privée, sur la mise en commun de tous les moyens de production et d'échange, et concevant la " prise au tas " comme le principal mode de répartition. Le communisme anarchiste diffère du communisme autoritaire dans la mesure où il implique la disparition de l'Etat et des institutions qui en procèdent.

ÉGALITÉ
Les anarchistes revendiquent l'égalité à la fois économique, sociale et morale pour tous les individus. Egalité et liberté sont indissociables, dans la mesure où elles procèdent toutes deux de l'autonomie et de la prise en charge individuelle et collective.

ENTRAIDE
Facteur de l'évolution des sociétés, l'entraide est une condition de la vie sociale et une garantie contre son contraire, la lutte entre les espèces. Plus l'entraide est pratiquée, plus la société se trouve dans une situation de progrès moral, intellectuel et social. Une société où les institutions d'entraide sont détruites au profit de l'Etat est une société de décadence. L'entraide est le fondement de l'éthique anarchiste.

ÉTHIQUE
Indispensable à l'existence de toute société, l'éthique, pour les anarchistes, est une série de règles morales non obligatoires, débarrassées de toute emprise religieuse, surnaturelle ou transcendantale. Fondées sur le respect de l'individu et de sa personnalité unique, ces règles ont pour fondement l'entraide et la reconnaissance de l'égalité, pour une plus grande justice sociale.
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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:37

FÉDÉRALISME LIBERTAIRE
Le fédéralisme est une forme d'organisation sociale qui a pour objet d'assurer les rapports des individus entre eux, les rapports de l'individu avec le groupe, les rapports des groupes entre eux. Opposée au centralisme, il a pour base essentielle l'autonomie des individus et des groupes. Il repose sur une grande loi naturelle : l'association, dont les fondements moraux sont la solidarité et l'entraide. A propos du fédéralisme libertaire

FÉDÉRATION
Structure de liaisons et de coordinations inspirées du fédéralisme. Opposée à la structure centraliste, elle laisse l'autonomie et la libre initiative à ses composantes comme à ses instances.

GESTION DIRECTE
La gestion directe suppose l'abolition de la propriété privée ou étatique des instruments de production et leur transfert aux travailleurs, qui en ont la possession. La gestion directe suppose aussi : - la suppression de tous les privilèges au sein de l'entreprise et l'égalité économique et sociale ; - la répartition du produit de la fabrication entre les travailleurs de l'entreprise, les collectivités chargés de l'infrastructure indispensable à une économie globale. Elle assure ainsi l'équilibre entre les différentes branches industrielles, l'agriculture, les services, voire les entreprises elles-mêmes.

GRÈVE GÉNÉRALE GESTIONNAIRE ET EXPROPRIATRICE
En plus de la cessation du travail, la grève générale gestionnaire et expropriatrice implique l'occupation du lieu de travail, l'expropriation des possédants capitalistes (libéraux ou d'Etat) et la prise en main, par les travailleurs et à leur profit, des moyens de production et de distribution.

INDIVIDUALISME
Système basé sur l'individu, qui a l'individu pour fin et l'individu pour agent "(Raoul Odin). Comme on le voit dans cette citation, pour les individualistes la société ne représente pas une entité, mais une somme d'individus dont les intérêts priment sur l'intérêt collectif. Ethique personnelle et humanitariste, l'individualisme s'est souvent cloisonné dans des positions de principes.

INTERNATIONALISME PROLÉTARIEN
L'internationalisme prolétarien affirme l'identité d'intérêts communs, et la solidarité qui en découle, entre les prolétaires du monde entier, par-delà les barrières artificielles imposées par les Etats.

JUSTICE
Jus était, à l'origine, un mot dont le sens était d'ordre religieux. Etendu, puis restreint à un sens. d'ordre laïque, jus a donné justus, justicià, puis par composition avec le grec : judicare et jueda. Dans le premier sens, il traduit la philosophie morale de ce qui est juste. Dans le second, il désigne l'action de dire le droit. C'est ainsi qu'un même mot peut définir deux domaines fort différents, voire souvent antagonistes. D'évidence, les tribunaux de justice n'ont rien de commun avec la justice morale. Les lois, élaborées par quelques-uns, n'ont qu'un seul souci : perpétuer le droit des pouvoirs économique et politique et la division de la société en classes. Par opposition à tout cela, l'idée-force philosophique, sociologique et morale de justice est essentielle à tout projet global cohérent de société fondé sur la liberté. La justice est une réalité et un idéal, rendant toutes les conditions équivalentes et solidaires. Il en résulte donc l'égalité devant la justice qui, affranchie de tout intérêt personnel et de toute considération divine, devient un idéal qui s'étend sans cesse. Pour mieux saisir le sens de cette définition, il n'est besoin que de ôter OEfle faiæ par P.]. Proudhon*, qui contient tous les grands thèmes de la morale anarchiste. " L'homme, en vertu de la raison dont il est doué, a la faculté de sentir sa dignité dans la personne de son semblable comme dans sa propre personne, et d'aHirmer, sous ce rapport, son identité avec lui. " La justice est le produit de cette faculté : c'est le respect, spontanément éprouvé et réciproquement garanti, de la dignité humaine, en quelque personne et dans quelque circonstance qu'elle se trouve compromise et à quelque risque que nous expose sa défense. " Le respect est au plus bas degré chez le barbare qui y supplée par la religion ; il se fortifie et se développe chez le civilisé, qui pratique la justice pour elle-même, et s'affranchit incessamment de tout intérêt personnel et de toute considération divine. . . " " Le " droit " est pour chacun la faculté d'exiger des autres le respect de la dignité humaine dam sa personne ; le " devoir ", l'obligation pour chacun de respecter cette dignité en autri. " Au fond, droit et devoir sont termes identiques, puisqu'ils sont toujours l'expression du respect, eK1#1ble ou dû ; exigible parce qu'ù est dû ; dû parce qu'il est exigible. Ils ne différent que par le sujet, moi ou toi, en qui la dignité est compromise. " [Cette définition] énonce un fait, à savoir que s'il n'y a pas toujours et nécessairement communauté d'intérêts entre les hommes, il y a toujours et essentiellement solidarité de dignité, chose supérieure à l'intérêt. " Elle est pure de tout élément mystique, physiologique. A la place de la religion des dieux, c'est le respect de l'humanité ; au lieu d'une affection animale, d'une sorte de magnétisme organique, le sentiment exalté que la raison a d'elle-même... " * P.-J. Proudhon : De la justice dans la Révolution et dans l'Eglise.

LIBERTAIRE
Bien que synonyme du mot anarchiste, le terme de libertaire est parfois utilisé par ceux qui se proclament partisans d'une liberté maximale, sans reprendre forcément à leur compte l'ensemble des théories anarchistes.

MANDAT
Fonction, d'une durée variable, donnée par un individu, une collectivité à un tiers ou à plusieurs personnes, pour qu'il(s) la remplisplisse(ent) en leur nom. Pour les anarchistes, le mandat doit être précis, d'une durée déterminée, et le mandaté révocable à tout moment, par opposition à la délégation de pouvoir.

MUTUALISME
Système économique fondé sur la mutualité, c'est-à-dire la réciprocité illimitée, impliquant la liberté d'échange et de contrat, en l'absence de tout monopole ou privilège. Liberté absolue d'association volontaire en l'absence de toute organisation coercitive.

ORGANISATION SPECIFIQUE ANARCHISTE
Elle regroupe des militant-e-s travaillant sur des bases communes et ayant défini le seul mode de structuration que peuvent avoir les anarchistes : le fédéralisme. Fédéralisme qu'il faut alors adapter à la situation géographique et sociale du milieu dam lequel on milite. L'anarchisme et l'organisation anarchiste ont leurs principes intangibles, quelle que soit la situation et sur la base de ces principes définis ; seules des modifications de détails, des ajouts, des analyses de réactualisation peuvent être apportées. L'organisation spécifique forme des militants, propage l'anarchisme et se prépare à l'affrontement dans lequel elle devra jouer un rôle primordial.

PLURALISME
Philosophie selon laquelle les êtres sont multiples, individuels, et ne dépendent pas d'une réalité absolue. Le pluralisme naît d'une évidence primordiale, d'une observation existentielle, d'une constatation sociologique. La société apparaît spontanément constituée par un ensemble de groupes, de personnes, qui sont autant de cellules vivantes que de centres actifs. A la fois autonomes et solidaires, en opposition et en composition, ils engendrent, par leurs imbrications,, leurs tensions et leur complémentarité, la vie même et le développement social.

POLITIQUE
Art et pratique du gouvernement des sociétés humaines, relatif aux rapports du gouvernement et de ses oppositions, au pouvoir et à la lutte autour de celui-ci. La politique est la science de gouverner par l'Etat.

PROLÉTARIAT
Ensemble de ceux qui n'ont, pour faire vivre les leurs et eux-mêmes, que leur force de travail. Le prolétaire jouit de la liberté civique, mais n'a que le travail comme unique moyen de subsistance.

PROPRIÉTÉ
Qu'elle soit privée ou étatique, la propriété est le droit d'user et d'abuser, de jouir et de disposer d'une chose d'une manière exclusive et absolue, sous les restrictions établies par la loi. Remettant en cause la notion de propriété, les anarchistes ne nient pas le concept de possession, qui est la faculté d'user sans abuser d'un bien dont on dispose. En revanche, les moyens de production et de distribution sont considérés comme possession de l'ensemble de la société.

PROVOCATION
Pratique employée par l'Etat, au cours de l'histoire, pour discréditer le mouvement social. Ces provocations ont suscité des actes violents, bien souvent répréhensibles, commis par des individus qui n'avaient pas grand-chose à voir avec la pratique et les principes authentiques de l'anarchisme ou qui, souvent, ont été manoeuvrés par la police ou les services secrets des Etats, dans le dessein de faire rejaillir l'opprobre sur l'ensemble du mouvement ouvrier.

RÉFORMISME
Doctrine de ceux qui, tout en s'affirmant en faveur d'une transformation sociale ayant pour objet d'asseoir l'organisation de la société sur des principes et fondements opposés à ceux qui existent, se proposent d'aboutir à ces résultats par une série, plus ou moins considérable, de réformes partielles plus ou moins importantes, dam le cadre de la légalité.

RÉVOLUTION SOCIALE
Moyen à travers lequel les anarchistes veulent instaurer une société fédéraliste libertaire, débarrassée de toute aliénation mystique et fondée sur l'égalité économique et sociale. Conséquence d'un mouvement de masse, la révolution sociale a pour objet un changement radical de société par la suppression de l'Etat et de ses institutions, l'expropriation des détenteurs des moyens de production, abolissant ainsi toute exploitation de l'homme par l'homme.

SOCIALISME
Doctrine qui entend faire prévaloir l'intérêt, le bien général, sur les intérêts particuliers, au moyen d'une organisation concertée. Parce qu'il ne considère que l'intérêt de "tous" et non pas l'intérêt de "tous et de chacun", le socialisme n'englobe pas. Pour les marxistes, d'ailleurs, le socialisme est la phase transitoire de l'évolution sociale pendant laquelle s'exerce la dictature "du prolétariat" au moyen de l'Etat sur l'ensemble de la société. Cette phase interviendrait après l'élimination du capitalisme et avant que le communisme ne puisse être réalisé.

SOCIETE
Ensemble des individus, des groupements et de leurs rapports organiques. L'individu étant le fruit de ces rapports, la vie en société est donc une condition essentielle à son développement.

SYNDICAT
Groupement au moyen duquel s'assemblent les travailleurs, pour la défense d'intérêts matériels ou moraux qui leur sont communs. Le syndicat est constitué en confédération qui regroupe deux types de fédérations : les fédérations d'industrie qui réunissent au plan national les syndicats d'une même branche, et les unions locales et régionales qui rassemblent dans une même localité ou une même région les syndicats des différentes branches. L'action des syndicats devrait se dérouler en dehors de toute influence politique ou religieuse ; mais l'évolution du syndicalisme d'intégration et de collaboration nous montre que la réalité est toute autre.

SYNDICALISME REVOLUTIONNAIRE
Le syndicalisme révolutionnaire se veut une force autonome, destinée à assurer, dans l'immédiat, l'émancipation des travailleurs et, dans l'avenir, à fournir les structures de l'organisation sociale. Le syndicalisme révolutionnaire veut remplacer l'Etat par le syndicat qui, de groupement de résistance, deviendra groupement de production et de distribution. A terme, le syndicat n'est plus un instrument de lutte, mais l'idéal de la société future.

TERRORISME
Méthode de gouvernement qui s'appuie sur la terreur pour contraindre les membres d'une collectivité à l'obéissance ; la peur étant un des principaux moyens d'autorité. Le terrorisme, comme technique de gouvernement ou de conquête du pouvoir, peut être considéré comme la continuation de la politique. Terrorisme gouvernemental ou d'opposition n'étant que les deux faces d'un même terrorisme d'Etat.

TRAVAIL
Action intelligente des hommes en société sur la matière, dans un dessein de satisfaction personnelle. Nécessaire à la vie de toute société, il lui donne son unité d'action, sa cohérence collective, engendre la diversification des fonctions et des produits. Le travail détermine les diverses phases de la croissance d'une société et, par la suite, tout son organisme. Les anarchistes luttent contre l'exploitation du travail de tous par quelques-uns, au moyen du salariat, mode de rémunération individuelle, non proportionné au travail collectif.
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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:42

L'individu, la société et l'État
Emma Goldman


Le doute règne dans l'esprit des hommes car notre civilisation tremble sur ses bases. Les institutions actuelles n'inspirent plus confiance et les gens intelligents comprennent que l'industrialisation capitaliste va à l'encontre des buts mêmes qu'elle est censée poursuivre.
Le monde ne sait comment s'en sortir. Le parlementarisme et la démocratie périclitent et certains croient trouver un salut en optant pour le fascisme ou d'autres formes de gouvernements "forts".
Du combat idéologique mondial sortiront des solutions aux problèmes sociaux urgents qui se posent actuellement (crises économiques, chômage, guerre, désarmement, relations internationales, etc.). Or, c'est de ces solutions que dépendent le bien-être de l'individu et le destin de la société humaine.
L'État, le gouvernement avec ses fonctions et ses pouvoirs, devient ainsi le centre d'intérêt de l'homme qui réfléchit. Les développements politiques qui ont eu lieu dans toutes les nations civilisées nous amènent à nous poser ces questions: voulons-nous d'un gouvernement fort ?

Devons nous préférer la démocratie et le parlementarisme ?
Le fascisme, sous une forme ou sous une autre, la dictature qu'elle soit monarchique, bourgeoise ou prolétarienne offrent-ils des solutions aux maux ou aux difficultés qui assaillent notre société ?
En d'autres termes, parviendrons-nous à effacer les tares de la démocratie à l'aide d'un système encore plus démocrate, ou bien devrons-nous trancher le noeud gordien du gouvernement populaire par l'épée de la dictature ?
Ma réponse est : ni l'un ni l'autre. Je suis contre la dictature et le fascisme, je suis opposée aux régimes parlementaires et au soi-disant démocraties politiques. C'est avec raison qu'on a parlé du nazisme comme d'une attaque contre la civilisation. On pourrait dire la même chose de toutes les formes de dictature, d'oppression et de coercition.
Car qu'est-ce que la civilisation ?
Tout progrès a été essentiellement marqué par l'extension des libertés de l'individu au dépens de l'autorité extérieure tant en ce qui concerne son existence physique que politique ou économique. Dans le monde physique, l'homme a progressé jusqu'à maîtriser les forces de la nature et les utiliser à son propre profit. L'homme primitif accomplit ses premiers pas sur la route du progrès lorsqu'il parvient à faire jaillir le feu, triomphant ainsi de l'homme, à retenir le vent et à capter l'eau.
Quel rôle l'autorité ou le gouvernement ont-ils joué dans cet effort d'amélioration, d'invention et de découverte ?
Aucun, ou plutôt aucun qui soit positif. C'est toujours l'individu qui accomplit le miracle, généralement en dépit des interdictions, des persécutions et de l'intervention de l'autorité, tant humaine que divine.
De même dans le domaine politique, le progrès consiste à s'éloigner de plus en plus de l'autorité du chef de tribu, de clan, du prince et du roi, du gouvernement et de l'État. Économiquement, le progrès signifie plus de bien-être pour un nombre sans cesse croissant. Et culturellement, il est le résultat de tout ce qui s'accomplit par ailleurs, indépendance politique, intellectuelle et psychique de plus en plus grande.
Dans ces perspectives, les problèmes de relation entre l'homme et l'État revêtent une signification tout à fait nouvelle. Il n'est plus question de savoir si la dictature est préférable à la démocratie, si le fascisme italien est supérieur ou non à l'hitlérisme. Une question beaucoup plus vitale se pose alors à nous : le gouvernement politique, l'État est-il profitable à l'humanité et quelle est son influence sur l'individu ?

Emma Goldman et Alexandre Berkman en Urss

L'individu est la véritable réalité de la vie, un univers en soi.
Il n'existe pas en fonction de l'État, ou de cette abstraction qu'on appelle "société" ou "nation", et qui n'est autre qu'un rassemblement d'individus. L'homme a toujours été, est nécessairement la seule source, le seul moteur d'évolution et de progrès. La civilisation est le résultat d'un combat continuel de l'individu ou des groupements d'individus contre l'État et même Ñ contre la "société", c'est-à-dire contre la majorité hypnotisée par l'État et soumise à son culte. Les plus grandes batailles que l'homme ait jamais livrées l'ont été contre des obstacles et des handicaps artificiels qu'il s'est lui-même imposés et qui paralysent son développement. La pensée humaine a toujours été faussée par les traditions, les coutumes, l'éducation trompeuse et inique, dispensées pour servir les intérêts de ceux qui détiennent le pouvoir et jouissent de privilèges; autrement dit, par l'État et les classes possédantes. Ce conflit incessant a dominé l'histoire de l'humanité.
On peut dire que l'individualité, c'est la conscience de l'individu d'être ce qu'il est, et de vivre cette différence. C'est un aspect inhérent à tout être humain et un facteur de développement. L'État et les institutions sociales se font et se défont, tandis que l'individualité demeure et persiste. L'essence même de l'individualité, c'est l'expression, le sens de la dignité et de l'indépendance, voilà son terrain de prédilection. L'individualité, ce n'est pas cet ensemble de réflexes impersonnels et machinaux que l'État considère comme un "individu". L'individu n'est pas seulement le résultat de l'hérédité et de l'environnement, de la cause et de l'effet. C'est cela, mais aussi beaucoup plus. L'homme vivant ne peut pas être défini; il est source de toute vie et de toutes valeurs, il n'est pas une partie de ceci ou de cela ; c'est un tout, un tout individuel, un tout qui évolue et se développe, mais qui reste cependant un tout constant.
L'individualité ainsi décrite n'a rien de commun avec les diverses conceptions de l'individualisme et surtout pas avec celui que j'appellerai "individualisme de droite, à l'américaine", qui n'est qu'une tentative déguisée de contraindre et de vaincre l'individu dans sa singularité. Ce soi-disant individualisme, que suggère les formules comme "libre entreprise", "american way of life", arrivisme et société libérale, c'est le laisser-faire économique et social ; l'exploitation des masses par les classes dominantes avec l'aide de la fourberie légale; la dégradation spirituelle et l'endoctrinement systématique de l'esprit servile, processus connu sous le nom "d'éducation". Cette forme d' "individualisme" corrompu et vicié, véritable camisole de force de l'individualité, réduit la vie à une course dégradante aux biens matériels, au prestige social; sa sagesse s'exprime en une phrase: "Chacun pour soi et maudit soit le dernier".

Inévitablement, l' "individualisme" de droite débouche sur l'esclavage moderne, les distinctions sociales aberrantes et conduit des millions de gens à la soupe populaire. Cet "individualisme"-là, c'est celui des maîtres, tandis que le peuple est enrégimenté dans une caste d'esclaves pour servir une poignée de "surhommes" égocentriques. L'Amérique est, sans doute, le meilleur exemple de cette forme d'individualisme, au nom duquel tyrannie politique et oppression sociale sont élevées au rang de vertus : tandis que la moindre aspiration, la moindre tentative de vie plus libre et plus digne seront immédiatement mises au compte d'un anti-américanisme intolérable et condamnées, toujours au nom de ce même individualisme.
Il fut un temps où l'État n'existait pas. L'homme a vécu dans des conditions naturelles, sans État ni gouvernement organisé. Les gens étaient groupés en petites communautés de quelques familles, cultivant le sol et s'adonnant à l'art et à l'artisanat. L'individu, puis plus tard la famille, était la cellule de base de la vie sociale; chacun était libre et l'égal de son voisin. La société humaine de cette époque n'était pas un État mais une association volontaire où chacun bénéficiait de la protection de tous. Les aînés et les membres les plus expérimentés du groupe en étaient les guides et les conseillers. Ils aidaient à régler les problèmes vitaux, ce qui ne signifie pas gouverner et dominer l'individu. Ce n'est que plus tard qu'on vit apparaître gouvernement politique et État, conséquences du désir des plus forts de prendre l'avantage sur les plus faibles, de quelques-uns contre le plus grand nombre.
L'État ecclésiastique, ou séculier, servit alors à donner une apparence de légalité et de droit aux torts causés par quelques-uns au plus grand nombre. Cette apparence de droit était le moyen le plus commode de gouverner le peuple, car un gouvernement ne peut exister sans le consentement du peuple, consentement véritable, tacite ou simulé.
Le constitutionnalisme et la démocratie sont les formes modernes de ce consentement prétendu, inoculé par ce qu'on appelle "éducation", véritable endoctrinement public et privé.
Le peuple consent parce qu'on le persuade de la nécessité de l'autorité ; on lui inculque l'idée que l'homme est mauvais, virulent et trop incompétent pour savoir ce qui est bon pour lui. C'est l'idée fondamentale de tout gouvernement et de toute oppression. Dieu et l'État n'existent et ne sont soutenus que par cette doctrine.

Pourtant l'État n'est rien d'autre qu'un nom, une abstraction. Comme d'autres conceptions du même type, nation, race, humanité, il n'a pas de réalité organique. Appeler l'État un organisme est une tendance maladive à faire d'un mot un fétiche.
Le mot État désigne l'appareil législatif et administratif qui traite certaines affaires humaines, mal la plupart du temps. Il ne contient rien de sacré, de saint ou de mystérieux. L'État n'a pas de conscience, il n'est pas chargé d'une mission morale, pas plus que ne le serait une compagnie commerciale chargée d'exploiter une mine de charbon ou une ligne de chemin de fer.
L'État n'a pas plus de réalité que n'en ont les dieux ou les diables. Ce ne sont que des reflets, des créations de l'esprit humain, car l'homme, l'individu est la seule réalité. L'État n'est que l'ombre de l'homme, l'ombre de son obscurantisme, de son ignorance et de sa peur.
La vie commence et finit avec l'homme, l'individu. Sans lui, pas de race, pas d'humanité, pas d'État. Pas même de société. C'est l'individu qui vit, respire et souffre. Il se développe et progresse en luttant continuellement contre le fétichisme qu'il nourrit à l'égard de ses propres inventions et en particulier de l'État.
L'autorité religieuse a édifié la vie politique à l'image de celle de l'Église. L'autorité de l'État , les "droits" des gouvernants venaient d'en haut ; le pouvoir, comme la foi, était d'origine divine. Les philosophes écrivirent d'épais volumes prouvant la sainteté de l'État, allant parfois jusqu'à lui octroyer l'infaillibilité. Certains répandirent l'opinion démente que l'État est "suprahumain", suprême, que c'est la réalité suprême, "l'absolu".
La recherche était un blasphème, la servitude la plus haute des vertus. Grâce à de tels principes, on en vint à considérer certaines idées comme des évidences sacrées, non que la vérité en eut été démontrée, mais parce qu'on les répétait sans cesse.
Les progrès de la civilisation sont essentiellement caractérisés par une mise en question du "divin" et du "mystère", du prétendu sacré et de la "vérité" éternelle, c'est l'élimination graduelle de l'abstrait auquel se substitue peu à peu le concret. Autrement dit, les faits prennent le pas sur l'imaginaire, le savoir sur l'ignorance, la lumière sur l'obscurité.
Le lent et difficile processus de libération de l'individu ne s'est pas accompli avec l'aide de l'État. Au contraire, c'est en menant un combat ininterrompu et sanglant que l'humanité a conquis le peu de liberté et d'indépendance dont elle dispose, arraché des mains des rois, des tsars et des gouvernements.

Le personnage héroïque de ce long Golgotha est celui de l'Homme.
Seul ou uni à d'autres, c'est toujours l'individu qui souffre et combat les oppressions de toute sorte, les puissances qui l'asservissent et le dégradent.
Plus encore, l'esprit de l'homme, de l'individu, est le premier à se rebeller contre l'injustice et l'avilissement; le premier à concevoir l'idée de résistance aux conditions dans lesquelles il se débat. L'individu est le générateur de la pensée libératrice, de même que de l'acte libérateur.
Et cela ne concerne pas seulement le combat politique, mais toute la gamme des efforts humains, en tout temps et sous tous les cieux. C'est toujours l'individu, l'homme avec sa puissance de caractère et sa volonté de liberté qui ouvre la voie du progrès humain et franchit les premiers pas vers un monde meilleur et plus libre ; en sciences, en philosophie, dans le domaine des arts comme dans celui de l'industrie, son génie s'élève vers des sommets, conçoit "l'impossible", matérialise son rêve et communique son enthousiasme à d'autres, qui s'engagent à leur tour dans la mêlée. Dans le domaine social, le prophète, le visionnaire, l'idéaliste qui rêve d'un monde selon son coeur, illumine la route des grandes réalisations.
L'État, le gouvernement, quels qu'en soient la forme, le caractère, qu'il soit autoritaire ou constitutionnel, monarchique ou républicain fasciste, nazi ou bolchevik, est de par sa nature même conservateur, statique, intolérant et opposé au changement. S'il évolue parfois positivement c'est que, soumis à des pressions suffisamment fortes, il est obligé d'opérer le changement qu'on lui impose, pacifiquement parfois, brutalement le plus souvent, c'est-à-dire par les moyens révolutionnaires.
De plus, le conservatisme inhérent à l'autorité sous toutes ses formes devient inévitablement réactionnaire. Deux raisons à cela : la première c'est qu'il est naturel pour un gouvernement, non seulement de garder le pouvoir qu'il détient, mais aussi de le renforcer, de l'étendre et de le perpétuer à l'intérieur et à l'extérieur de ses frontières. Plus forte est l'autorité, plus grands l'État et ses pouvoirs, plus intolérable sera pour lui une autorité similaire ou un pouvoir politique parallèle. La psychologie gouvernementale impose une influence et un prestige en constante augmentation, nationalement et internationalement, et il saisira toutes les occasions pour les accroître. Les intérêts financiers et commerciaux soutenant le gouvernement qui les représente et les sert, motivent cette tendance. La raison d'être fondamentale de tous les gouvernements, sur laquelle les historiens des temps passés fermaient volontairement les yeux, est si évidente aujourd'hui que les professeurs eux-mêmes ne peuvent plus l'ignorer.
L'autre facteur, qui astreint les gouvernements à un conservatisme de plus en plus réactionnaire, est la méfiance inhérente qu'il porte à l'individu, la crainte de l'individualité. Notre système politique et social ne tolère pas l'individu avec son besoin constant d'innovation. C'est donc en état de "légitime défense" que le gouvernement opprime, persécute, punit et parfois tue l'individu, aidé en cela par toutes les institutions dont le but est de préserver l'ordre existant. Il a recours à toutes les formes de violence et il est soutenu par le sentiment "d'indignation morale" de la majorité contre l'hérétique, le dissident social, le rebelle politique : cette majorité à qui on a inculqué depuis des siècles le culte de l'État, qu'on a élevée dans la discipline, l'obéissance et la soumission au respect de l'autorité, dont l'écho se fait entendre à la maison, à l'école, à l'église et dans la presse.

Max Stirner
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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:43

Le meilleur rempart de l'autorité, c'est l'uniformité
L a plus petite divergence d'opinion devient alors le pire des crimes. La mécanisation à grande échelle de la société actuelle entraîne un surcroît d'uniformisation. On la trouve partout présente dans les habitudes, les goûts, le choix des vêtements les pensées, les idées. Mais c'est dans ce qu'on est convenu d'appeler "l'opinion publique" qu'on en trouve le concentré le plus affligeant. Bien peu ont le courage de s'y opposer. Celui qui refuse de s'y soumettre est aussitôt "bizarre, différent, suspect", fauteur de troubles au sein de l'univers stagnant et confortable de la vie moderne.
Plus encore sans doute que l'autorité constituée, c'est l'uniformité sociale qui accable l'individu. Le fait même qu'il soit "unique, différent" le sépare et le rend étranger à son pays et même à son foyer, Ñ plus parfois que l'expatrié dont les vues coïncident généralement avec celles des "indigènes". Pour un être humain sensible, il n'est pas suffisant de se trouver dans son pays d'origine, pour se sentir chez lui, en dépit de ce que cela suppose de traditions, d'impressions et de souvenirs d'enfance, toutes choses qui nous sont chères. I1 est beaucoup plus essentiel de trouver une certaine atmosphère d'appartenance, d'avoir conscience de "faire corps" avec les gens et l'environnement, pour se sentir chez soi, qu'il s'agisse de relations familiales, de relations de voisinage ou bien de celles qu'on entretient dans la région plus vaste qu'on appelle communément son pays. L'individu capable de s'intéresser au monde entier, ne se sent jamais aussi isolé, aussi incapable de partager les sentiments de son entourage que lorsqu'il se trouve dans son pays d'origine.
Avant la guerre, l'individu avait tout au moins la possibilité d'échapper à l'accablement national et familial. Le monde semblait ouvert à ses recherches, à ses élans, à ses besoins. Aujourd'hui, le monde est une prison et la vie une peine de détention perpétuelle à purger dans la solitude. Cela est encore plus vrai depuis l'avènement de la dictature, celle de droite comme celle de gauche.

Friedrich Nietzsche qualifiait l'État de monstre froid.
Comment qualifierait-il la bête hideuse cachée sous le manteau de la dictature moderne ?
Non que l'État ait jamais alloué un bien grand champ d'action à l'individu ; mais, les champions de la nouvelle idéologie étatique ne lui accorde même plus le peu dont il disposait. "L'individu n'est rien", estiment-ils. Seule la collectivité compte. Ils ne veulent rien moins que la soumission totale de l'individu pour satisfaire l'appétit insatiable de leur nouveau dieu.
Curieusement, c'est au sein de l'intelligentsia britannique et américaine qu'on trouve les plus farouches avocats de la nouvelle cause. Pour le moment, les voilà entichés de la "dictature du prolétariat". En théorie seulement, bien sûr. Car, en pratique, ils préfèrent encore bénéficier des quelques libertés qu'on leur accorde dans leur pays respectif. Ils vont en Russie pour de courtes visites, ou en tant que courtiers de la "révolution", mais ils se sentent tout de même plus en sûreté chez eux.
D'ailleurs, ce n'est peut-être pas seulement le manque de courage qui retient ces braves Britanniques et ces Américains dans leur propre pays. Ils sentent, peut-être inconsciemment, que l'individu reste le fait fondamental de toute association humaine et que, si opprimé et persécuté qu'il soit, c'est lui qui vaincra à la longue.
Le "génie de l'homme" qui n'est autre qu'une façon différente de qualifier la personnalité et son individualité, se fraie un chemin à travers le labyrinthe des doctrines, à travers les murs épais de la tradition et des coutumes, défiant les tabous, bravant l'autorité. affrontant l'outrage et l'échafaud Ñ pour être parfois comme prophète et martyr par les générations suivantes. Sans ce "génie de l'homme", sans son individualité inhérente et inaltérable, nous en serions encore à parcourir les forêts primitives.
Pierre Kropotkine a montré les résultats fantastiques qu'on peut attendre lorsque cette force qu'est l'individualité humaine oeuvre en coopération avec d'autres. Le grand savant et penseur anarchiste a pallié ainsi, biologiquement et sociologiquement, l'insuffisance de la théorie darwinienne sur le combat pour l'existence. Dans son ouvrage remarquable l'Entraide, Kropotkine montre que dans le règne animal aussi bien que dans la société humaine, la coopération Ñ par opposition aux luttes intestines n'oeuvre dans le sens de la survivance et de l'évolution des espèces. Il démontre que, au contraire de l'État dévastateur et omnipotent, seules l'entraide et la coopération volontaire constituent les principes de base d'une vie libre fondée sur l'individu et l'association.
Pour le moment, l'individu n'est qu'un pion sur l'échiquier de la dictature et entre les mains des fanatiques de "l'individualisme à l'américaine". Les premiers se cherchent une excuse dans le fait qu'ils sont à la poursuite d'un nouvel objectif. Les seconds ne prétendent même pas être des innovateurs. En fait, les zélateurs de cette "philosophie" réactionnaire n'ont rien appris et rien oublié. Ils se contentent de veiller à ce que survive l'idée d'un combat brutal pour l'existence, même si la nécessité de ce combat a complètement disparu. Il est évident qu'on perpétue celui-ci justement parce qu'il est inutile. La soi-disant surproduction n'en est-elle pas la preuve ? La crise économique mondiale n'est-elle pas l'éloquente démonstration que ce combat pour l'existence ne doit sa survie qu'à l'aveuglement des tenants du "chacun pour soi", au risque d'assister à l'autodestruction du système.
L'une des caractéristiques insensées de cette situation, c'est l'absence de relation entre le producteur et l'objet produit. L'ouvrier moyen n'a aucun contact profond avec l'industrie qui l'emploie, il reste étranger au processus de production dont il n'est qu'un rouage. Et comme tel, il est remplaçable à tout moment par d'autres êtres humains tout aussi dépersonnalisés.
Le travailleur qui exerce une profession intellectuelle ou libérale, bien qu'il ait la vague impression d'être plus indépendant, n'est guère mieux loti. Lui non plus n'a pas eu grand choix, ni plus de possibilité de trouver sa propre voie dans sa branche d'activité, que son voisin le travailleur manuel. Ce sont généralement des considérations matérielles, un désir de prestige social qui déterminent l'orientation de l'intellectuel. Vient s'ajouter à cela la tendance à embrasser la carrière paternelle pour devenir instituteur, ingénieur, reprendre le cabinet d'avocat ou de médecin, etc. car la tradition familiale et la routine ne demandent ni gros efforts ni personnalité. En conséquence, la majorité des gens sont mal insérés dans le monde du travail. Les masses poursuivent péniblement leur route, sans chercher plus loin, d'abord parce que leurs facultés sont engourdies par une vie de travail et de routine ; et puis il leur faut bien gagner leur vie. On retrouve la même trame dans les cercles politiques, peut-être avec, plus de force. Il n'y est fait aucune place pour le libre choix, la pensée ou l'activité indépendante. On n'y rencontre que des marionnettes tout juste bonnes à voter et à payer les contributions.
Les intérêts de l'État et ceux de l'individu sont fondamentalement antagonistes. L'État et les institutions politiques et économiques qu'il a instaurées ne peuvent survivre qu'en façonnant l'individu afin qu'ils servent leurs intérêts ; ils l'élèvent donc dans le respect de la loi et de l'ordre, lui enseignent l'obéissance, la soumission et la foi absolue dans la sagesse et la justice du gouvernement; ils exigent avant tout le sacrifice total de l'individu lorsque l'État en a besoin, en cas de guerre par exemple. L'État juge ses intérêts supérieurs à ceux de la religion et de Dieu. Il punit jusque dans ses scrupules religieux ou moraux l'individu qui refuse de combattre son semblable parce qu'il n'y a pas d'individualité sans liberté et que la liberté est la plus grande menace qui puisse peser sur l'autorité.
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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptySam 9 Avr - 14:43

la suite...


Le combat que mène l'individu dans des conditions aussi défavorables -il en va souvent de sa vie- est d'autant plus difficile qu'il ne s'agit pas, pour ses adversaires, de savoir s'il a tort ou raison. Ce n'est ni la valeur ni l'utilité de sa pensée ou de son action qui dresse contre lui les forces de l'État et de "l'opinion publique". Les persécutions contre l'innovateur, le dissident, le protestataire, ont toujours été causées par la crainte que l'infaillibilité de l'autorité constituée ne soit mise en question et son pouvoir sapé.
L'homme ne connaîtra la véritable liberté, individuelle et collective, que lorsqu'il s'affranchira de l'autorité et de sa foi en elle. L'évolution humaine n'est qu'un pénible cheminement dans cette direction. Le développement, ce n'est en soi ni l'invention ni la technique. Rouler à 150 Km à l'heure n'est pas un signe de civilisation. C'est à l'individu, véritable étalon social, que se mesure notre degré de civilisation ; à ses facultés individuelles, à ses possibilités d'être librement ce qu'il est ; de se développer et de progresser sans intervention de l'autorité coercitive et omniprésente.
Socialement parlant, la civilisation et la culture se mesurent au degré de liberté et aux possibilités économiques dont jouit l'individu ; à l'unité et à la coopération sociale et internationale, sans restriction légale ni autre obstacle artificiel ; à l'absence de castes privilégiées ; à une volonté de liberté et de dignité humaine ; en bref, le critère de civilisation, c'est le degré d'émancipation réelle de l'individu.
L'absolutisme politique a été aboli parce que l'homme s'est aperçu, au cours des siècles, que le pouvoir absolu est un mal destructeur. Mais il en va de même de tous les pouvoirs, que ce soit celui des privilèges, de l'argent, du prêtre, du politicien ou de la soi-disant démocratie. Peu importe le caractère spécifique de la coercition s'il revêt la couleur noire du fascisme, le jaune du nazisme ou le rouge prétentieux du bolchevisme. Le pouvoir corrompt et dégrade aussi bien le maître que l'esclave, que ce pouvoir soit aux mains de l'autocrate, du parlement ou du soviet. Mais le pouvoir d'une classe est plus pernicieux encore que celui du dictateur, et rien n'est plus terrible que la tyrannie de la majorité.
Au cours du long processus historique, l'homme a appris que la division et la lutte mènent à la destruction et que l'unité et la coopération font progresser sa cause, multiplient ses forces et favorisent son bien-être. L'esprit gouvernemental travaille depuis toujours à l'encontre de l'application sociale de cette leçon fondamentale, sauf lorsque l'État y trouve son intérêt. Les principes conservateurs et antisociaux de l'État et de la classe privilégiée qui le soutient, sont responsables de tous les conflits qui dressent les hommes les uns contre les autres. Ils sont de plus en plus nombreux ceux qui commencent à voir clair, sous la surface de l'ordre établi. L'individu se laisse moins aveugler par le clinquant des principes étatiques et les "bienfaits" de "l'individualisme" préconisé par les sociétés dites libérales. Il s'efforce d'atteindre les perspectives plus amples des relations humaines que seule procure la liberté. Car la véritable liberté n'est pas un simple chiffon de papier intitulé "constitution, droit légal ou loi". Ce n'est pas non plus une abstraction dérivée de cette autre irréalité appelée "État". Ce n'est pas l'acte négatif d'être libéré de quelque chose ; car cette liberté-là n'est que la liberté de mourir de faim.

La vraie liberté est positive ; c'est la liberté vers quelque chose, la liberté d'être, de faire et les moyens donnés pour cela.
II ne peut alors s'agir d'un don, mais d'un droit naturel de l'homme, de tous les êtres humains.
Ce droit ne peut être accordé ou conféré par aucune loi, aucun gouvernement. Le besoin, le désir ardent s'en fait sentir chez tous les individus. La désobéissance à toutes les formes de coercition en est l'expression instinctive. Rébellion et révolution sont des tentatives plus ou moins conscientes pour se l'octroyer. Ces manifestations individuelles et sociales sont les expressions fondamentales des valeurs humaines. Pour nourrir ces valeurs, la communauté doit comprendre que son appui le plus solide, le plus durable, c'est l'individu. Dans le domaine religieux comme dans le domaine politique, on parle d'abstractions tout en croyant qu'il s'agit de réalités. Mais quand on en vient vraiment à traiter de choses concrètes, il semble que la plupart des gens soient incapables d'y trouver un intérêt vital. C'est peut-être que la réalité est par trop terre-à-terre, trop froide pour éveiller l'âme humaine. Seuls les sujets différents, peu ordinaires, soulèvent l'enthousiasme. Autrement dit, l'Idéal qui fait jaillir l'étincelle de l'imagination et du coeur humain. Il faut quelque idéal pour sortir l'homme de l'inertie et de la monotonie de son existence et transformer le vil esclave en personnage héroïque.
C'est ici qu'intervient évidemment l'opposant marxiste dont le marxisme Ñ dépasse d'ailleurs celui de Marx lui-même. Pour celui-là, l'homme n'est qu'une figurine aux mains de cette toute puissance métaphysique qu'on appelle déterminisme économique, plus vulgairement lutte des classes. La volonté de l'homme, individuelle et collective, sa vie psychique, son orientation intellectuelle, tout cela compte pour bien peu de chose chez notre marxiste et n'affecte en rien ses conceptions de l'histoire humaine.
Aucun étudiant intelligent ne nierait l'importance du facteur économique dans le progrès social et le développement de l'humanité. Mais seul un esprit obtus et obstinément doctrinaire se refusera à voir le rôle important de l'idée, en tant que conception de l'imagination et résultat des aspirations de l'homme.
Il serait vain et sans intérêt de tenter de comparer deux facteurs de l'histoire humaine. Aucun facteur ne peut être considéré, à lui seul, comme le facteur décisif de l'ensemble des comportements individuels et sociaux. Nous sommes trop peu avancés en psychologie humaine, peut-être même n'en saurons-nous jamais assez pour peser et mesurer les valeurs relatives de tel ou tel facteur déterminant du comportement humain. Formuler de tels dogmes, dans leurs connotations sociales, n'est que fanatisme ; pourtant, on verra une certaine utilité dans le fait que cette tentative d'interprétation politico-économique de l'histoire prouve la persistance de la volonté humaine et réfute les arguments des marxistes.
Heureusement, certains marxistes commencent à voir que leur Credo n'est pas toute vérité ; après tout, Marx n'était qu'un être humain, bien trop humain pour être infaillible. Les applications pratiques du déterminisme économique en Russie ouvrent, actuellement, les yeux des marxistes les plus intelligents. On peut voir, en effet, des réajustements s'opérer au niveau des principes marxistes dans les rangs socialistes et même dans les rangs communistes des pays européens. Ils comprennent lentement que leur théorie n'a pas assez tenu compte de l'élément humain, des Menschen ainsi que le souligne un journal socialiste. Aussi important soit-il, le facteur économique n'est cependant pas suffisant pour déterminer à lui seul le destin d'une société. La régénération de l'humanité ne s'accomplira pas sans l'aspiration, la force énergétique d'un idéal.
Cet idéal, pour moi, c'est l'anarchie, qui n'a évidemment rien à voir avec l'interprétation erronée que les adorateurs de l'État et de l'autorité s'entendent à répandre. Cette philosophie jette les bases d'un ordre nouveau fondé sur les énergies libérées de l'individu et l'association volontaire d'individus libres.

De toutes les théories sociales, l'Anarchie est la seule à proclamer que la société doit être au service de l'homme et non l'homme au service de la société. Le seul but légitime de la société est de subvenir aux besoins de l'individu et de l'aider à réalisa ses désirs. Ce n'est qu'alors qu'elle se justifie et participe aux progrès de la civilisation et de la culture. Je sais que les représentants des partis politiques et les hommes qui luttent sauvagement pour le pouvoir me taxeront d'anachronisme incorrigible. Eh bien, j'accepte joyeusement cette accusation. C'est pour moi un réconfort de savoir que leur hystérie manque d'endurance et que leurs louanges ne sont jamais que temporaires.

L'homme aspire à se libérer de toutes les formes d'autorité et de pouvoir et ce ne sont pas les discours fracassants qui l'empêcheront de briser éternellement ses chaînes.
Les efforts de l'homme doivent se poursuivre et ils se poursuivront.

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MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptyVen 15 Avr - 2:09

De l'époque


1. Ce monde est en faillite. A l'Est comme à l'Ouest, au Nord comme au Sud, partout règnent l'oppression et l'exploitation, si ce n'est la misère. Partout, l'immense majorité des femmes et des hommes sont exclus de la maîtrise sur leur vie, comme des grands choix qui déterminent la vie et l'avenir des sociétés.

2. Un système s'est écroulé à l'Est. D'aucuns à droite comme certains à gauche le disaient "communiste" ou "socialiste". Cela relève de l'escroquerie politique et intellectuelle, puisqu'il n'avait en réalité rien à voir avec une quelconque société émancipée, encore moins avec le communisme. Les anarchistes et les autres courants anti-autoritaires du mouvement ouvrier l'ont dit et redit depuis 1918. Bien plus, ces courants ont activement participé à la révolution russe. Ils y ont combattu théoriquement et pratiquement le nouveau pouvoir dictatorial des bolchéviques et la contre-révolution qu'il représentait. Très loin d'avoir "construit le socialisme", les nouveaux maîtres et leur Parti ont érigé un nouveau mode d'oppression et d'exploitation. Ils ont bâti une nouvelle société de classes, un capitalisme bureaucratique d'Etat. La forme classique de la propriété privée a ainsi été remplacée par la domination d'une classe bureaucratique. Celle-ci dirigeait, pour ses propres intérêts mais au nom du prolétariat, la production et l'échange, et dominait l'ensemble de la société par le Parti-Etat. Notre projet d'émancipation n'a jamais rien eu de commun avec cette caricature de socialisme. Nous ne pouvons qu'applaudir la fin de ce modèle autoritaire de société.

3. Le capitalisme réellement existant est désormais nu. Il ne pourra plus profiter du repoussoir "soviétique". Il envahit la planète dans ses moindres recoins et colonise l'ensemble des activités humaines. Et jamais pourtant, il n'aura autant dévoilé son incapacité à répondre aux besoins, même les plus élémentaires, des femmes et des hommes. Jamais il n'aura autant démontré son impuissance à satisfaire leur soif de justice et de dignité.

4. Le travail humain devient toujours plus productif. Mais au même moment, la misère et la famine s'étendent au Sud, le chômage et la précarité se répandent dans les sociétés dites développées, qu'on annonçait il y a peu encore sorties de la pénurie. Déboussolée, la société du Capital propose à ceux qui le peuvent de se gaver de marchandises, et aux autres, au mieux de survivre, au pire de crever. Seuls les besoins solvables sont satisfaits sur le marché. L'opulence côtoie le dénuement et la misère: entre deux, une haie de flics. A la "prospérité" de quelques uns au Nord répond le génocide rampant des masses pauvres du Sud et l'exclusion, la "nouvelle pauvreté" au Nord.

5. Sans compter le désastre écologique intrinsèquement lié au capitalisme: le profit et la domination sur la nature et sur les hommes comme seuls moteur et critère, le mode incontrôlé de croissance et de consommation signifie pillage des matières premières et production irresponsable de déchets. Les destructions irrémédiables de l'environnement se multiplient. C'est la biosphère elle-même qui est menacée et avec elle l'existence de l'ensemble des êtres vivants, humains compris.

6. Une telle société, sans avenir ni perspectives, n'offre plus ni sens ni valeurs. Société cynique, elle ne peut que conduire à des régressions sociales. On les connaît déjà: retour en force des intégrismes religieux et des nationalismes meurtriers, résurgences conséquentes de l'extrême-droite et des populismes fascisants, justification des guerres impérialistes et autres carnages au nom des droits de l'homme et de la démocratie, etc.

7. Il faut réaffirmer haut et fort la nécessité et la possibilité de changer ce monde. Contrairement à ce que proclament tous les discours à la mode, l'histoire ne s'est pas arrêtée avec le "triomphe" du capitalisme libéral et la mort du "communisme". Un tel non- sens n'est que propagande des classes dominantes. Elle vise à maintenir les dominés dans la résignation et la passivité. La fin du socialisme réellement inexistant, et donc de l'épouvantail qu'il constituait, est une chance historique. Il nous donne l'occasion de réarmer notre combat contre le capitalisme, lui réellement existant !

Notre projet

8. Notre pratique vise à un changement radical des conditions sociales dominantes. Nous voulons voir advenir un ordre social qui redonne aux hommes et aux femmes le pouvoir sur leur propre existence et sur l'ensemble des mécanismes et institutions de la société. Il s'agit d'en finir avec l'exploitation, la discrimination, l'injustice, les rapports de pouvoir et d'exclusion. Nous portons un projet d'auto-institution, d'auto-gouvernement de la société par elle-même, dans le respect de l'être humain comme de la biosphère.

9. Nous voulons une organisation sociale radicalement démocratique, c'est-à-dire structurée de bas en haut, fondée sur le pouvoir des assemblées générales d'atelier, de bureau, d'entreprise, de maison, de bloc, de quartier ou d'activité, regroupant l'ensemble des personnes concernées. Un tel modèle exclut l'existence de tout pouvoir séparé de la société, qui finit tôt ou tard par se retourner contre elle comme l'ont tristement démontré tant la social-démocratie que les différentes variantes du léninisme.

10. Une telle organisation sociale implique la socialisation des moyens de production et, de manière plus générale, la ré-appropriation par les gens eux-mêmes de l'ensemble des médiations et institutions sociales. Une telle conception est radicalement incompatible avec l'existence de structures comme l'Etat, le capitalisme, le patriarcat.

Un trajet conforme aux fins

11. Le projet révolutionnaire est éthique. Il postule que fins et moyens sont inséparables: "Le but fait le chemin, le chemin fait le but". Il affirme que la vérité est toujours révolutionnaire. Nous refusons l'idée et les pratiques léninistes du parti centralisé, hiérarchisé, bâti comme une armée, car il implique un rapport d'instrumentalisation et de manipulation autant des militants que des mouvements de masse. Viser une société autogérée, sans pouvoir séparé, c'est refuser de reproduire au nom de l'efficacité, dans les luttes sociales comme dans l'organisation révolutionnaire, un fonctionnement autoritaire propre à la société de classe. Nous refusons un fonctionnement qui oppose dirigeants et exécutants, bureaux politiques omniscients et militants soumis. Dès maintenant et sans attendre des jours meilleurs, nous devons pratiquer l'auto-organisation, expérimenter la prise en charge de nos propres affaires, autogérer nos luttes, bâtir d'autres relations sociales. L'autogestion est à la fois but et moyen. Elle se comprend dans une perspective dynamique, et non comme une société parfaite et idéale à atteindre en des lendemains qui chantent.

12. L'Histoire nous enseigne que les conquêtes sociales, les droits, les avancées significatives, n'ont jamais été octroyées par des dominants bienfaisants. Ce que nous avons a été arraché dans la lutte sociale. Conquérir du pouvoir sur notre vie, c'est donc bâtir le rapport de forces pour faire reculer les dominants. Et seule l'auto-activité des dominés conduit à ce rapport de forces.

13. Nous combattons la délégation de pouvoir qui domine tant les institutions que la réalité sociale actuelles. En effet, celle-ci fonde et renforce l'impuissance subjective et objective des dominés et fait obstacle à leur auto-activité, leur auto-organisation. A la délégation, nous opposons l'action directe des dominés. C'est en devenant acteurs de leurs luttes, des plus petites aux plus décisives, que les dominés pourront avancer vers des temps meilleurs, et non pas en remettant leur sort aux mains de "spécialistes" (avant-gardes, politiciens, techniciens, savants, leaders charismatiques). Une certaine forme de délégation demeure sans doute incompressible. Seule l'auto-activité la plus large permet de la limiter et de la contrôler démocratiquement (fonctionnement d'assemblées, mandats impératifs et révocables). Une démocratie radicale développant la nécessaire circulation et répartition des tâches et des mandats est susceptible d'empêcher la mainmise de groupes minoritaires sur les tâches déléguées. C'est la seule garantie dont on dispose pour empêcher la constitution, à partir de ce processus de monopolisation, d'un pouvoir séparé.
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caserio
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pourquoi anarchistes..? Empty
MessageSujet: ...   pourquoi anarchistes..? EmptyVen 15 Avr - 2:10

14. A ce titre, nous n'orientons pas nos activités vers la participation aux institutions de la démocratie représentative bourgeoise (parlements et exécutifs communaux, cantonaux, fédéraux), mais vers la croissance d'une authentique démocratie sociale. Une participation aux institutions étatiques, même de façon "oppositionnelle" et "critique", renforce la tendance à la délégation et conduit à l'acceptation active que d'autres agissent et décident à notre place. Elle contribue à l'intériorisation et à l'institutionalisation de l'impuissance, et ce d'autant plus que le pouvoir réel dans la société relève plus des entreprises et de leurs lobbies que des institutions.

15. Par contre, cela ne signifie pas que nous renoncions à l'usage ciblé des moyens de la démocratie semi-directe (initiative et référendum). Mais cet usage ne doit bien sûr pas être systématique, ni devenir un ersatz de lutte et de confrontation sociale. Dans certains cas, la démocratie semi-directe peut à notre sens offrir une plate-forme d'action utilisable, soit de par la question posée (Suisse sans armée), soit parce que celle-ci nous permet de l'habiter de manière radicale. Le critère déterminant dans les deux cas est pour nous le caractère de rupture de la campagne que l'enjeu nous permet de mener. Les initiatives et les référendums "de rupture" peuvent jouer un rôle dans le processus de construction de l'autonomie politique des dominés. Mais seulement dans la mesure où ils permettent de faire apparaître et de rendre visible dans la société des mouvements de contestation et de dissidence, cassant ainsi la permanente opération d'atomisation et de marginalisation menée par le pouvoir, Mais ces contestations resteront insuffisantes si elles ne se transforment pas en organisation des dominés, en pratiques antagonistes.

Avec qui ? Sortir du ghetto !

16. Nous refusons toute politique, aussi "radicale" se proclame-t-elle, qui conduit à l'enfermement et à l'auto-marginalisation. Nous voulons parler aux gens tels qu'ils sont, là où ils sont. Nous voulons contribuer à ouvrir des terrains où les hommes et les femmes puissent faire l'expérience de l'auto-organisation, de l'autogestion des luttes et imposer des espaces de contre-pouvoir, ici et maintenant. Pour nous, une société réellement démocratique, organisée de bas en haut, ne peut surgir que du changement des pratiques et des consciences des gens, dans la réappropriation de leur capacité d'action et de création sociales.

17. Se revendiquer de la révolution, ce n'est donc pas attendre passivement un Grand Soir mythique. Ce n'est pas se gargariser de la spontanéité des masses qui finiront bien par se réveiller. Le pouvoir nous a enseigné depuis notre plus jeune âge la passivité et la soumission. Il ne faut donc pas s'attendre à voir surgir spontanément l'auto-activité, encore moins la voir se manifester d'emblée exempte de toute ambiguïté. Ce sera une lutte de tous les instants, avec ses bonds en avant comme avec ses reculs. Nous ne pouvons donc nous tenir à l'écart des mouvements réels et des aspirations concrètes dont ils sont porteurs, même si ceux-ci ne reflètent pas la totalité de ce que nous souhaiterions ou s'ils sont le champ de contradictions qui les empêchent de développer leurs pleines potentialités (tendance à la délégation p.e.).

18. Pour asseoir et maintenir sa domination, tout pouvoir, et particulièrement celui du Capital, recherche la division des dominés, l'atomisation et le repli sur soi des individus qu'il contrôle. C'est très clair dans la période de crise que nous traversons: apologie de l'individu égoïste et de la concurrence, valorisation des gagnants et mépris des perdants et des exclus. Dans ce contexte, chacun est incité à compenser les humiliations qu'il subit sur l'autre: l'atomisation en ressort grandie, avec la domination des mâles sur les femmes, celle des adultes sur les enfants, ainsi que l'intolérance entre "nationaux" et "étrangers", entre diverses communautés immigrées, entre vieux et jeunes...

19. Nous savons pourtant que la contestation de ce monde passe par la solidarité, par le dépassement de l'isolement où les maîtres veulent nous enfermer, par l'organisation des dominés et la fin de la concurrence. Partout où nous sommes, dans le quartier, dans le travail, dans les mouvements, il nous faut urgemment reconstituer des tissus de solidarité et d'action collective. Il importe de briser l'isolement, de prendre la parole, d'apprendre à lutter. Nous devons sortir de notre ghetto confortable de révolutionnaires et redescendre sur le terrain. Il en va non seulement de notre projet à long terme, de notre envie de socialisme. Il en va aussi de la possibilité à court terme de barrer la route à l'extrême-droite, aux fanatismes et aux populismes droitiers divers qui se nourrissent de la crise, du désarroi, de l'isolement qu'entretient le Capital.

20. La gauche de ce pays est obnubilée par la politique institutionnelle faite de parlementarisme, de démocratie semi-directe et de syndicalisme corseté par la Paix du travail. Elle a fini par déserter la société civile, les quartiers et les lieux de travail. La résurgence d'une gauche anti-capitaliste conséquente et implantée au sein des classes dominées demande de rompre avec ces habitudes suicidaires. Notre projet ne peut devenir crédible que si nous sommes capables d'avancer avec les gens pour répondre à leurs besoins dès maintenant.

21. En l'état de faiblesse des mouvements sociaux dans ce pays, comme de l'inexistence de traditions de confrontation sociale, la nécessité de conclure des alliances, ne serait-ce que tactiques, s'impose d'elle-même. Notre conception de l'autogestion des luttes et de la démocratie à la base dans les mouvements nous conduit à accepter et/ou à rechercher les convergences qui se donnent avec l'ensemble des forces "progressistes", quelles que puissent être les divergences que nous pouvons avoir avec elles par ailleurs.

22. Nous devons conjuguer d'un côté un travail dans les secteurs liés à la gauche institutionnelle et dans les mouvances plus combatives qui sont apparues au fil de la crise de cette même gauche. D'un autre côté, nous devons intervenir auprès de cette majorité de dominés qui sont exclus de l'activité politique ou qui la refusent, mais qui parfois développent, dans le travail et dans la vie quotidienne, des pratiques de résistance, des micro-conflictualités, des procédures limitées de subversion de la domination et de l'exploitation.

23. La condition impérative du travail au côté d'autres forces et/ou dans des mouvements larges reste pour nous l'existence d'espaces de démocratie interne réelle qui nous permettent d'exprimer notre sensibilité et nos orientations spécifiques. Nous nous opposons donc radicalement à toute prétention de contrôle de quelque composante que ce soit sur le mouvement.

Quelle organisation ?

24. Nous sommes convaincus de la nécessité pour les libertaires de ne pas se limiter à une intervention locale ou sectorielle, mais de se donner les structures et les moyens de débattre les orientations, les perspectives stratégiques et les problèmes généraux. Il importe de coordonner, de confronter et d'élaborer ensemble les bases d'une stratégie révolutionnaire globale, intégrant les différentes expériences de mouvements, de luttes, de lieux et de secteurs. Cette stratégie, par définition soumise à redéfinition et à débat permanents, et par conséquent souvent multiple et plurielle, peut ensuite faire retour, s'incarner et se vérifier dans les luttes locales et sectorielles dont elle est issue.

25. Elle peut aussi donner aux libertaires les moyens de s'affirmer centralement dans des mouvements d'envergure nationale (ou plus larges), que ce soit pour y faire avancer des propositions, pour y exprimer une perspective de rupture ou pour combattre une volonté de monopoliser le pouvoir.

26. L'OSL constitue à ce jour la seule organisation libertaire dans ce pays, qui dépasse le cadre local, même si son aire d'implantation limitée (quelques villes de Suisse romande) ne lui permet pas d'assumer le rôle de ce pôle national libertaire que nous voudrions voir se dégager. Par contre, certains de nos acquis, fruit de l'expérience accumulée au fil des années nous apparaissent incontournables.

27. Pour nous, l'autogestion des luttes et l'auto-activité sont des principes qui doivent également s'appliquer à l'organisation révolutionnaire, à ce titre nous pratiquons la plus large autonomie des différents groupes associés à l'OSL. Les structures fédérales se limitent à des fonctions de secrétariat et à des assemblées ouvertes à l'ensemble des membres et sympathisants.

28. Ainsi la question des minorités: à l'OSL, dans le cadre d'un accord politique général, nous reconnaissons à toute minorité le droit de mettre en application ses conceptions, même si celles-ci sont en contradiction avec les orientations majoritaires. La discussion politique interne, elle, se poursuit alors sur la base des résultats obtenus par les diverses orientations en présence, jusqu'au moment où une nouvelle position de synthèse se dégage.

29. L'OSL refuse l'idée d'un terrain prioritaire d'intervention. La société du capital s'immisce partout dans notre vie ("L'usine est partout"). Elle la contraint bien au delà de la sphère de la production, même si celle-ci demeure à bien des égards centrale. C'est dire que nous combattons la domination sur tous les terrains, dans tous les espaces de vie, sans exclusive. Dans l'entreprise comme dans le quartier ou la ville, par la critique du patriarcat comme des rapports impérialistes, par le refus du militarisme comme de la catastrophe écologique qui se prépare, dans le syndicat ou dans les mouvements et associations, partout où nous sommes, partout où nous pouvons, nous luttons avec d'autres pour conquérir du pouvoir sur notre vie.
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MessageSujet: Georges Brassens, ..., que pensez-vous de l'anarchie?   pourquoi anarchistes..? EmptyMar 26 Avr - 15:47

Voila un ch'tit extrait audio d'une discussion k'avaient eu Georges Brassens, Jaques Brel & Léo Ferré sur l'anarchie et leur position face à celle-ci.

Publié par mes soins sur mon serveur, elle vous est à portée de main!

batman http://mypage.bluewin.ch/cubrixgeneva/anarchie.mp3 batman
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MessageSujet: Re: pourquoi anarchistes..?   pourquoi anarchistes..? Empty

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